Durant les travaux de rénovation du bâtiment de l’Accademia Carrara de Bergame, le Musée de l’Hermitage accueille à Lausanne, jusqu’au 26 octobre 2008, un choix de peintures de cette ancienne institution – elle abrite une galerie et une école de dessin depuis 1775.
Les œuvres exposées présentent l’intérêt commun de révéler la Renaissance, période qui, selon de très nombreux historiens, a vu naître l’art tel qu’on le pratique aujourd’hui en Occident.
L’histoire de la remise en question de la représentation iconographique codifiée, spécialement celle de Dieu, Jésus, la Vierge et les Saints, dont les retables sont un bon exemple, est présente dans toutes les salles. Les œuvres telles que la Vierge à l’Enfant (1482-1483) de Carlo Crivelli, comme celle (1470-1475) de Neroccio di Bartolomeo de Landi ou Vir dolurum (l’Homme de douleur) (1405) de Lorenzo Monaco semblent s’être échappées d’un polyptique. Le passage de la sphère religieuse au monde laïque se lit d’emblée dans les tableaux figurant la Vierge et l’Enfant. Les vierges deviennent des femmes et les Jésus des rejetons ordinaires. Les auréoles surnaturelles qui cohabitent avec cette avancée matérialiste créent un climat énigmatique: par exemple les Vierge à l’Enfant de Cosmé Tura (1460/1465), Jacobello di Antonello (1480), et surtout celles de Giovanni Bellini (1476) et du Titien (1507), pièces essentielles de l’exposition.
Ce langage pictural hybride s’appuie sur l’utilisation très maîtrisée de la perspective, de la profondeur de champ chère plus tard aux photographes. Il s’exprime aussi dans les arrière-fonds, souvent des paysages de villes ou de campagnes très structurées, par exemple celui du Saint Sébastien (1502) de Raphaël et celui plus étendu de la Nativité (1504) de Pietro Vannucci dit Pérugin.
L’exposition montre aussi l’évolution de l’innovation apportée par la Renaissance vers le conformisme, la dynamique se poursuivant ailleurs en Flandres. Ce qui n’empêche pas des résurgences novatrices, comme les portraits de Giovan Battista Moroni et les paysages des Vénitiens Giovanni Antonio Canal dit Canaletto, maître des vues de Venise aux perspectives savamment déformées, présent avec Le Grand Canal vu duPalais Balbi (1727/28); son neveu Bernardo Bellotto avec l’Arc de Titus (1743) à Rome; Gianbattista Tiepolo avec Saint Maxime et Saint Oswald (1744/45). Une mention encore pour un autre maître des vues de Venise et des caprices au sens italien de capriccio, œuvre s’écartant des règles ordinaires: Francesco Guardi avec Vue de la place Saint-Marc en direction de la basilique (1760/70) et Caprice avec passage couvert et groupe de Pulcinella (1770/75).
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