Le botellón, voilà la dernière bulle médiatique de l’été. Cette pratique collective, importée d’Espagne, diabolisée avant même que des jeunes se réunissent dans les parcs ou sur les places de Berne, Zurich, Genève et Lausanne, a donné lieu à des descriptions apocalyptiques de foules enivrées, violences et désordres sur fond de consommation de drogues. Les médias comme gardiens de l’ordre moral mais qui, par l’attention disproportionnée qu’ils portent au phénomène, poussent les participants à ces soirées arrosées à jouer le rôle qu’on attend d’eux.
Est-ce vraiment l’abus d’alcool consommé dans le cadre de telles rencontres qui effraie autorités et médias? En d’autres occasions – Street Parades, fêtes de jeunesse et d’entreprise, manifestations sportives entre autres –, l’alcool coule à flots sans susciter un tel intérêt et pareil effroi. Les professionnels de la prévention jugent plus graves les soûlographies courantes et moins médiatisées d’une partie de la jeunesse. Non, ce qui dérange, ce qui fait peur même, c’est le caractère spontané et soudain de ces rassemblements, favorisé par les nouveaux moyens de communication. Pour le sociologue zurichois Kurt Imhof (Tages Anzeiger, 20.08.08), les réactions indignées face à ces jeunes immatures sont celles d’une société elle-même immature, qui préfère stigmatiser des groupes – jeunes, étrangers,…– plutôt que de débattre de ses problèmes. D’ailleurs, poursuit l’universitaire, toute forme collective de déviance a de meilleures chances de susciter la réflexion que la déviance individuelle ou en petits groupes.
Les ripostes variées des villes – interdiction à Lausanne et à Berne, opposition sans interdiction formelle à Zurich, tolérance et dialogue à Genève – font espérer qu’il y a place encore pour cette réflexion.
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