Si l’on excepte les maladies d’origine génétique, chacun est responsable de sa santé. C’est en tout cas ce que laisse penser les multiples campagnes de prévention qui nous incitent à ne pas fumer, à boire modérément, à manger quotidiennement notre ration de fruits et légumes, à ne pas négliger l’exercice physique. Et lorsqu’un mal nous affecte, le praticien prescrit un médicament censé remédier au dysfonctionnement biologique qui le provoque.
Richard G. Wilkinson, un médecin et épidémiologiste britannique, étudie depuis plus de vingt ans les déterminants de la santé et du bien-être. Il conclut que les comportements et les caractéristiques personnels ne sont pas seuls en cause. Santé et bien-être dépendent fortement de facteurs sociaux structurels, comme le souligne une recension sur le site de La vie des idées.
Le chercheur met en évidence le rôle des inégalités sociales. En effet, parmi les pays dits développés, les sociétés les plus inégalitaires ont les taux de mortalité les plus élevés. En Grande-Bretagne, on a enregistré des progrès significatifs dans la santé des civils durant les deux guerres mondiales, périodes durant lesquelles les inégalités étaient sensiblement réduites. De même l’espérance de vie a stagné puis décliné dans les pays de l’Europe de l’Est, parallèlement à l’accroissement des inégalités socio-économiques.
Wilkinson n’ignore pas l’impact des conditions matérielles sur la santé: les riches vivent plus longtemps que les pauvres. Mais il constate que les facteurs qui influent le plus sur la santé et le bien-être sont de nature psycho-sociale. Ce n’est pas tant la pauvreté absolue qui est en cause que la pauvreté relative, celle qu’engendre précisément des inégalités sociales trop criantes. Wilkinson montre, sur la base de données empiriques, que la conscience que nous avons de notre place dans la société et de notre situation matérielle n’est pas étrangère aux processus biologiques qui déclenchent la maladie.
Dès lors on ne peut dissocier l’augmentation des coûts de la santé et la croissance des inégalités sociales. La lutte contre la surconsommation médicale doit donc inclure une réduction des inégalités et une amélioration des relations sociales – à cet égard la redistribution par l’impôt fait partie intégrante de la thérapie. Si l’industrie pharmaceutique n’y trouvera pas son compte, la cohésion sociale en sortira par contre renforcée.
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