Un quart des Suisses quittent leur emploi avant 65 ans. Avant de relever l’âge de la retraite, mieux vaut inciter les seniors à rester actifs. Pas question, bien sûr, de nier l’influence de la démographie sur le système de sécurité sociale de tous les pays industrialisés. Alors qu’en 1960 les plus de 65 ans ne représentaient que 8,5% de la population, le taux a grimpé aujourd’hui à 13,8 %. Il devrait dépasser 16 % demain, en 2020. Il y a toujours moins d’actifs pour financer les retraites. La Suisse ne fait pas exception à la règle, mais elle est bien placée en comparaison internationale. En France et en Allemagne, 60 % des seniors (55 à 64 ans) sont hors du marché du travail contre 35 % chez nous. Grâce à cette situation favorable, il n’est pas forcément indispensable de relever l’âge de la retraite en Suisse estime Fabio Bertozzi dans Les nouveaux défis de
l’Etat social. Pour alléger les finances de la sécurité sociale, on peut agir sur le nombre des personnes actives en favorisant le travail des femmes, la natalité et l’immigration (DP 1776).
Le maintien des seniors sur le marché du travail va dans la même direction. Mais il n’exige pas la contrainte de la retraite à 67 ans ou plus. Le marché du travail va lui-même procéder à certaines corrections. A cause de la faible natalité, toujours moins de jeunes entreront dans la vie active. La pénurie de main-d’œuvre nous guette. Le réflexe de renvoyer les vieux pour faire de la place aux jeunes, omniprésent dans les années 90, va s’atténuer. Mais il ne faut pas se borner à faire confiance au marché. La première urgence consiste à réformer le fonctionnement du deuxième pilier. Pour la partie obligatoire, le prélèvement est de 7 % du salaire jusqu’à 34 ans. Il atteint 18 % dès 55 ans. Le senior coûte nettement plus cher à l’employeur qui préférera renvoyer un travailleur âgé et le remplacer par un jeune. La Suisse pourrait également s’inspirer de l’exemple de l’Union européenne qui interdit la discrimination à l’embauche en raison de l’âge. Conséquence la plus visible de ce combat, la disparition de nos journaux des nombreuses offres d’emploi du style «Vous avez entre 25 et 45 ans, votre compétence nous intéresse». Les services de l’emploi devraient aussi revoir leur fonctionnement et mettre l’accent sur l’assistance aux vieux travailleurs abandonnés à leur sort et à une maigre retraite forcée.
En France, une propagande officielle massive vante les vertus et les compétences des travailleurs âgés. L’argent public s’investit pour changer les mentalités du public et des employeurs. La Suisse est étrangère à ce volontarisme d’Etat. Mais les organisations professionnelles qui revendiquent la fonction d’information et d’orientation des entreprises tardent à agir. Elles en sont encore à l’étude d’une campagne de sensibilisation
Un directeur de banque aurait largement la possibilité matérielle de prendre une retraite anticipée. Mais il s’accroche à son poste. A l’inverse celui dont le travail est physiquement pénible n’a pas les moyens de cesser son activité. Cette inégalité manifeste doit dicter toute décision incitative ou impérative sur le travail des seniors.
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