Largement devancé en termes de suffrages par l’UDC, le parti radical (PRD) conserve l’avantage du sérieux de ses élus, de sa forte présence dans les exécutifs et les administrations ainsi que de ses liens étroits avec les milieux économiques. Les grandes organisations faîtières sont en effet encore largement sous la coupe de l’ex-grand vieux parti. A la tête d’economiesuisse, ex-Vorort, on trouve l’ancien président du PRD, le schaffhousois Gerold Bührer. Aux commandes de SwissMEM (industrie des machines), Johann Schneider-Amman, conseiller national bernois. Et comme président et directeur de l’Union suisse des arts et métiers (USAM), puissant lobby de PME, Edi Engelberger (NW) et Pierre Triponez (BE). Mais l’UDC s’en prend à cette suprématie. Elle n’y va pas avec le dos de la cuillère et «exige» publiquement des changements de personnes à la tête de l’USAM. N’importe quelle association subissant de pareilles convoitises ne manquerait certainement pas de s’offusquer et de clamer son indépendance.
Mais, au-delà de l’appartenance partisane des dirigeants patronaux, force est de constater que l’UDC, ou du moins son discours, gagne de plus en plus d’entrepreneurs et, partant, d’organisations économiques. Ainsi, swissmechanic, organisation concurrente de SwissMEM, est dirigée par Peter Spühler (TG), chantre de l’aile «économique» du parti de Christoph Blocher. Un Christoph Blocher, qui, encore conseiller fédéral, ne s’était pas gêné d’exhorter l’assemblée des délégués de la Société suisse des entrepreneurs (SSE) à «tenter le coup sans les syndicats», et donc à dénoncer la convention collective de travail (CCT) du secteur principal de la construction. La SSE est certes (encore) présidée par un parlementaire radical, Werner Messmer (TG), mais le récent refus de la médiation par la majorité de l’organisation témoigne de l’influence croissante de l’UDC dans ses rangs. Les manœuvres grossières des dirigeants de la SSE pour torpiller une des CCT les plus importantes du pays ne sont pas sans similitude avec le refus de principe de Swissmechanic de signer des conventions collectives. Une méthode appliquée du reste par M. Blocher lui-même lorsqu’il dirigeait EMS Chemie; n’étaient admis à la table des négociations que les syndicats «dociles».
L’UDC, inoculant ses idées et ses méthodes à défaut de placer ses pions, est donc en passe de s’installer aux commandes des milieux économiques. Ceux-ci semblent fort bien s’en accommoder, le parti ex-agrarien partageant la quasi-totalité de ses positions, en matière de fiscalité notamment. Reste à savoir si ces milieux iront jusqu’à apprécier l’huile versée sur le feu de la libre circulation des personnes par ce parti. Quant au PRD, déjà bien souvent à la remorque de l’UDC dans les parlements, perdre sa place prépondérante auprès des organisations patronales accélérerait sa chute vers l’insignifiance.
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