Les Chambres fédérales adopteront bientôt un nouveau code de procédure civile suisse (CPC). Ce code doit remplacer les 26 procédures cantonales. La réforme est nécessaire: le droit civil est certes unifié au niveau national depuis tout juste un siècle, mais des différences énormes subsistent au niveau de la procédure. Le projet du Conseil fédéral contient cependant une lacune qui pourrait porter préjudice à l’activité des syndicats, mais aussi des organisations patronales, des associations de locataires et des régies immobilières. Le nouveau CPC accorde en effet un monopole aux avocats pour représenter à titre professionnel les parties d’un procès civil, y compris devant les tribunaux des baux et des prud’hommes. Les cantons ne pourraient plus permettre à des secrétaires d’organisations de représenter directement leurs membres devant ces tribunaux de première instance.
La grande majorité des cantons (19 dont tous les cantons romands sauf Fribourg) connaît en effet ce système, souvent inscrit dans une loi, parfois passé dans les moeurs. A Saint-Gall, il est certes menacé par une réforme de la justice actuellement en cours, mais il sera peut-être bientôt introduit dans le canton de Berne, à la suite d’une motion. La suppression de ce droit de représentation devant les tribunaux de prud’hommes serait particulièrement préjudiciable aux intérêts des salariés. En effet, les secrétaires syndicaux connaissent souvent mieux les arcanes du droit du travail et des conventions collectives que les avocats. En outre il ne faut en pas oublier que, dans de nombreux cantons, les juges ou assesseurs des juridictions du travail sont des juges laïcs. Les confronter à des avocats briserait à n’en pas douter le principe de l’égalité des armes entre patrons et employés, qui prévaut dans la juridiction du travail. En effet, la plupart des salariés n’ont pas d’assurance de protection juridique, à l’inverse des employeurs. Ne pouvant plus directement faire valoir leur savoir-faire en matière de droit du travail devant les tribunaux, les syndicats ont beaucoup à perdre d’une telle réforme. Un monopole exclusif des avocats entraînerait aussi une explosion des coûts de procédure. Ainsi, l’expérience montre que syndicalistes et secrétaires patronaux sont beaucoup plus enclins à transiger et à liquider l’affaire avant jugement, alors que de nombreux avocats poussent à mener les procès à leur terme, puis à recourir, afin de justifier et d’augmenter leurs honoraires. Un tel allongement des factures et des procédures contreviendrait à une autre règle d’or de la juridiction des prud’hommes, qui postule que les procès de première instance doivent être bon marché et rapide.
Il reste à espérer que la commission des affaires juridiques saura maintenir ici cette petite dose de fédéralisme, malgré le contexte d’unification des procédures.
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