Le fédéralisme n’est pas un obstacle à la coopération de la Suisse avec l’Union européenne. Le Conseil fédéral l’écrit en tête de son tout récent rapport sur le fédéralisme. Le constat vaut aussi bien pour le rapprochement par les bilatérales que pour l’adhésion. Avec la publication de ce document, le gouvernement a l’honnêteté de prouver qu’il n’y a pas d’obstacle institutionnel à devenir membre de l’Union. Tout en répétant que l’adhésion n’est pas à l’ordre du jour.
L’adaptation de la Suisse à la réalité européenne est une exigence incontournable. La mise en œuvre des bilatérales apporte la preuve que les structures fédéralistes de la Suisse peuvent maîtriser l’«européanisation» grandissante de son droit. Plusieurs accords passés avec l’Europe touchent les compétences des cantons. La libre circulation des personnes règlemente l’octroi des allocations familiales et de l’aide sociale. L’accord sur le transport influence l’aménagement du territoire et l’entretien des routes. Les cantons sont directement concernés par l’accord sur les marchés publics. Schengen impose une coopération de la police. Pour les accords bilatéraux passés dans le cadre des compétences de la Confédération, les cantons sont également touchés. Ils sont responsables de leur application sur le terrain. Dans tous ces cas, la Confédération a dû mettre sur pied une coopération avec les cantons. Ils sont consultés avant l’ouverture de toute négociation et bénéficient d’un accès illimité à toutes les informations.
Un accord évolutif
Le cas de Schengen est particulièrement instructif. L’accord n’est pas statique. Il s’adapte aux modifications de la réglementation européenne. Pour suivre cette évolution, la Suisse a obtenu le droit de participer à l’élaboration des nouvelles normes. Comme les polices sont impliquées, des représentants des cantons siègent dans les organes de consultation à Bruxelles. Cette étroite participation à la politique européenne pourrait s’appliquer à l’identique en cas d’adhésion. Le champ d’intervention dans les domaines de compétence cantonale serait simplement étendu pour toucher, mais souvent marginalement, à la formation, la culture ou la santé.
Des budgets uniformes
La fiscalité constitue un cas particulier. Si elle échappe, théoriquement, à l’influence des accords bilatéraux, elle pourrait toucher la souveraineté cantonale en cas d’adhésion. En Europe, certains allégements fiscaux aux entreprises assimilées à des aides d’Etat peuvent être interdites. Si la Suisse devenait membre de l’Union, certaines pratiques cantonales tomberaient sous cette règle. Mais l’actualité nous apprend que, même en dehors de l’Europe, les largesses de certains petits cantons ne sont pas intouchables. L’adhésion apporterait une nouveauté absolue pour les cantons. Pour respecter la discipline budgétaire, les déficits annuels cumulés de la Confédération, des cantons et des communes ne devraient pas dépasser 3 % du PIB et leurs dettes 60% du PIB. Pour garantir cette discipline, la Suisse devrait imposer une présentation uniforme des budgets et fixer des règles pour répartir les efforts en cas de dépassement des plafonds. C’est une atteinte importante à l’autonomie des cantons et des communes. Mais comme la Suisse reste toujours un bon élève dans la gestion des finances publiques, la menace reste théorique.
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