Nicolas Sarkozy, président de droite, a donc choisi un ministre de gauche, Bernard Kouchner, pour diriger sa diplomatie. Coup médiatique en vue des élections législatives ou véritable volonté d’ouverture de la part du président? Trahison politique ou fidélité à ses idéaux de la part de l’ex-administrateur du Kosovo? On s’abstiendra de procès d’intention pour juger sur les actes. Cette nomination a suscité des réactions virulentes non seulement en France, mais aussi de la part de personnalités de gauche romandes. C’est plus surprenant.
La direction du parti socialiste français a annoncé dans la foulée l’exclusion du PS «de fait» et «automatique» du nouveau locataire du Quai d’Orsay. Plutôt que d’exclusion, on serait tenté de parler d’excommunication. Le droit de l’association prévoit en France comme en Suisse quelques garanties de procédure: l’exclusion doit être prise par un organe compétent après que l’intéressé ait pu faire valoir ses droits. Même Georges Frêche en a bénéficié. On s’interroge d’ailleurs de voir le Parti libéral vaudois, traditionnel défenseur des libertés individuelles, suivre les mêmes curieuses méthodes pour bannir ses membres qui ont rallié Ecologie libérale.
Surtout, la Suisse connaît bien la situation d’une ministre des affaires étrangères socialiste dans un gouvernement marqué à droite. La cheffe du département fédéral des affaires étrangères dirige pourtant notre diplomatie, du moins quant elle ne pousse pas la chansonnette à la télévision. Elle fait même figure de locomotive électorale pour la gauche. Le PS français reproche à Bernard Kouchner de devoir assumer l’ensemble de la politique de droite du gouvernement Fillon. En tant que membre du Conseil fédéral, Micheline Calmy-Rey doit assumer collégialement les décisions du gouvernement, même si elle ne les partage pas. Personne ne songe pourtant à l’exclure du PS.
Bernard Kouchner peut assumer sa responsabilité ministérielle tout en restant minoritaire dans un gouvernement de droite. Ce qui est attristant, c’est qu’il aggrave, par son attitude inhabituelle dans l’Hexagone, la division au sein d’un PS français qui n’en avait pas besoin.
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