Donc, les jeux étant faits, le Conseil d’Etat vaudois sera conforme à la répartition des forces qu’a révélée l’élection du Grand Conseil, majoritairement à droite. Mais, dira-t-on, cette victoire est mesurée et voulue telle dès le départ: quatre sièges sur sept. Dans cette composition, même si la radicale et le libéral sont positionnés nettement plus à droite que leurs prédécesseurs, Pascal Broulis sera en situation d’arbitre, s’il veut vraiment faire la démonstration de son centrisme. Quant à Joseph Zisyadis il a été très loyalement porté à bout de bras par les socialistes, mais en vain. Il ne peut s’appuyer sur un parti étoffé, il est usé par ses candidatures à répétitions et, alors qu’il est l’homme des coups médiatiques, il était tenu de se présenter en coéquipier discipliné. Mais si le résultat enregistre ces données selon une arithmétique correcte, il faut dire combien ces élections furent pour les citoyens frustrantes, les appareils des partis ayant verrouillé le jeu.
La prétendue modération des partis – ne revendiquer que quatre sièges sur sept – n’était pas une sagesse, mais leur incapacité à équilibrer leurs ambitions. A droite, si l’UDC présentait deux candidats, les libéraux auraient voulu en faire autant, et pour réaffirmer leur leadership les radicaux auraient avancé trois prétendants. 2+2+3=7. Et revendiquer 7 sièges sur 7, c’est-à-dire la totalité de la mise, c’est passer pour totalitaire, donc politiquement invendable.
Même réflexe à gauche. Une liste avec deux verts, trois socialistes et un A gauche toute, c’est-à-dire six candidats, aurait provoqué le même rejet. Une revendication limitée à quatre sièges était le seul moyen de concilier les prétentions et de souder les alliances.
Mais ces décisions tactiques eurent pour effet de priver les électeurs de toute faculté de choix. Ainsi les socialistes, qui avec Pierre-Yves Maillard et Anne-Catherine Lyon présentaient un bon bilan, ne pouvaient pas en faire profiter leur propre parti en lançant un troisième candidat qui aurait bénéficié du sillage des magistrats sortants. Au lieu de faire connaître une figure nouvelle, tout le prestige des sortants était investi dans le remorquage de Joseph Zisyadis. Les blocs préfabriqués par les partis étouffent la liberté de choix des électeurs. La démocratie en souffre.
L’exigence de la majorité absolue au premier tour justifie une pratique plus ouverte. Elle demande que chaque parti se présente d’abord seul sous sa couleur, en offrant par un surnombre ambitieux un choix aux électeurs. Le second tour, mais le second tour seulement, permet, sur la base des premiers résultats, d’affiner les présentations et de nouer éventuellement des alliances.
Si une leçon peut être tirée des élections vaudoises, c’est l’obligation de rendre aux électeurs toute leur liberté de choix démocratique.
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