Le déficit de l’AI est hémorragique : plus d’un milliard l’an. En juin 2005, le Conseil fédéral soumet au Parlement deux lois. L’une réorganisant l’assurance et imposant de fortes économies ; l’autre proposant un refinancement par une augmentation modérée de la TVA (0,8 point). Les deux Chambres commencent par traiter la loi de réorganisation, ce qui permet de mettre les opposants sous pression : si vous n’acceptez pas nos mesures d’économies, vous ne pourrez pas obtenir le refinancement. L’exercice réussit… sauf que, grain de sable, le référendum est lancé par des associations hors du jeu institutionnel, rejointes tardivement par le parti socialiste. Jusqu’à cet épisode, le scénario est classique : celui de la droite contre une gauche, résistant pied à pied, battue puis résignée avant d’être débordée hors du terrain parlementaire.
Mais l’épreuve du refinancement ne peut être éludée, malgré des manœuvres de retardement qui avaient pour but d’éviter qu’une votation devant ratifier une augmentation de la fiscalité ne tombe en période électorale. Chaque jour de retard, c’est cinq millions de perdus. Qu’importe ! La droite et les pères-la-rigueur financière s’offrent un délai de confort électoral à 1,5 milliard.
S’étant finalement mise au travail, la commission du National aboutit à un compromis : hausse modérée et surtout provisoire de la TVA (0,7 point pendant 7 ans). D’emblée l’UDC manifeste son opposition ; jamais elle ne jouera le jeu ingrat de la solidarité gouvernementale s’il s’agit de cautionner une hausse d’impôt, même si les faits la rendent incontournable.
Mais l’observateur s’intéressera à la manière dont les autres partis (radical, PDC, socialiste) se firent manœuvrer – le Conseil national ayant repoussé l’ensemble des propositions de la commission. La tactique est classique : l’UDC facilite par son abstention l’acceptation d’un amendement socialiste supprimant le caractère temporaire de la hausse, puis elle se joint à la droite classique qui ne veut pas défendre devant le peuple une hausse fiscale qui ne serait pas limitée dans le temps.
Donc pas de refinancement de l’AI assuré. La commission du National en avait pourtant fait un objet de chantage. Il fallait que le peuple accepte la loi révisée et soumise à référendum, sinon les propositions fiscales seraient caduques. Belle menace ! Le National lui–même les a fait disparaître. Les renards de la politique comptent sur le Conseil des Etats pour rétablir la situation. Peut-être en ce qui concerne la navette entre les Chambres. Mais comment entraîner ensuite le peuple et les cantons quand les parlementaires démontrent une telle incompétence révélatrice de leurs peurs.
Car il faut poser la question de fond. L’ensemble de la politique sociale exigera un refinancement. Or jamais l’UDC ne consentira à défendre une hausse des prélèvements obligatoires. Il appartient donc aux trois autres partis gouvernementaux de définir une politique commune qui ne permette pas à l’UDC de les manipuler. C’est l’enjeu majeur des élections de cet automne. Il est masqué par d’autres thèmes (formation, écologie) qui fâchent moins. Mais il ne peut être éludé. C’est la leçon du fiasco du financement de l’AI.
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