Depuis 43 ans, l’équipe de citoyens et de citoyennes qui font vivre Domaine Public est animée d’un sentiment rare et précieux de gratuité. Ne devant rien à personne, par pure décision personnelle, elle s’offre un journal, son journal. C’est dire que Domaine Public aurait pu disparaître depuis belle lurette, n’étaient le désir de continuer et l’endurance des rédacteurs qui y consacrent leurs loisirs. N’était aussi, bien sûr, l’intérêt, le soutien amical des abonnées et de celles et ceux qui ont souscrit une action de la Société anonyme des Editions Domaine Public. La somme de ces investissements, en temps surtout mais aussi en argent, est impressionnante. Ce qui les motive, c’est l’envie d’animer la réflexion politique en Suisse, dans la continuité. Domaine Public s’inscrit clairement, au-delà de l’événementiel, dans le temps long de la politique. Non pas dans le messianisme révolutionnaire mais dans un réformisme profond et marathonien.
En 1963, nous avions retardé au lendemain des élections fédérales le lancement de Domaine Public. Il y avait, certes, la crainte d’être noyé dans les tracts vantant les candidats ; il y avait aussi le besoin de témoigner de notre indépendance envers le parti socialiste, engagé dans la campagne électorale. Il y avait surtout, peut-être encore inconsciemment, le vœu de manifester notre liberté face aux rendez-vous obligés et aux échéances à court terme. Car c’est dans la durée que s’imposent à la conscience les problèmes à résoudre, que se fomentent les réformes, qu’aboutit le travail de conviction et de négociation. Dans la durée de l’application se révèlent les effets, positifs et négatifs, et les besoins de réformes ultérieures.
En 2007, c’est en pleine année électorale que nous lancerons la nouvelle formule, exclusivement électronique. Après avoir accompagné onze législatures, avec des thèmes dont pratiquement aucun n’a perdu sa pertinence, nous poursuivons notre engagement. Une double difficulté nous attend. D’abord, en choisissant Internet, nous devrons apprivoiser un média qui demande une plus grande agilité que le papier, mais qui permet à la fois d’offrir des liens avec d’autres sources d’information et de garder la mémoire des épisodes précédents. Ensuite, nous aurons, tout en gardant une vision commune de l’engagement militant et l’exigence de qualité, à animer un débat à voix multiples – entre nous et avec les internautes. Enfin, nous faisons le pari qu’un organisme tel qu’une équipe rédactionnelle peut se renouveler progressivement.
Ruth Dreifuss, Présidente du conseil d’administration de la Société anonyme des Editions Domaine Public.
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