Les journalistes de Suisse alémanique et du Tessin ont perdu le combat.
Les éditeurs ont dénoncé la convention collective et refusent le
dialogue. Ils fixent désormais librement les conditions de travail de
leurs collaborateurs. Sans convention, les journalistes sont libres de
faire la grève. Mais ils ne la font pas. Un scénario analogue va
probablement se dérouler dans la presse de Suisse romande régie par une
convention collective séparée. Les éditeurs francophones ont, à leur
tour, dénoncé ladite convention. Ils accepteraient de signer un nouveau
texte à condition que les journalistes consentent à d’importants
sacrifices salariaux. Consultés par leur syndicat
impressum, les journalistes romands ont massivement refusé ce
sacrifice. Cette négociation régressive n’est pas la première. En 1994,
au plus fort de la crise économique, les journalistes avaient consenti
à une première modification à la baisse de la grille des salaires (cf.
ci-dessous).
Après le vote massivement négatif des journalistes, les éditeurs ont
fait une ultime concession. La grille des salaires serait retouchée et
la perte cumulée sur 15 ans réduite à 26 000 au lieu de 36 000 francs.
Il appartiendra à une assemblée des délégués du syndicat impressum de
se prononcer définitivement. Le dialogue n’est donc pas définitivement
rompu. Mais le climat est délétère. Dans la foulée, les éditeurs
refusent désormais aux représentants du syndicat le droit participer à
des négociations au sein des entreprises de presse. Au début de cette
année, les mêmes éditeurs ont distribué des cartes de presse, alors que
l’octroi de la carte professionnelle est une prérogative essentielle
des organisations de journalistes.
Le climat est mauvais, mais la guerre n’aura probablement pas lieu. La
convention collective sera vraisemblablement refusée pas les
journalistes romands. Ils retrouveront le droit de grève. Mais, forts
de l’expérience alémanique, les éditeurs savent qu’ils peuvent
maîtriser la situation. Les journalistes craignent pour leur emploi.
Ils sont individualistes. La perte d’influence de leurs syndicats et la
fin du dialogue social ne leur paraît pas une catastrophe. Une baisse
immédiate de la fiche de paie aurait pu allumer le feu de la révolte.
Les éditeurs n’ont pas fait cette erreur. Leur liberté retrouvée, ils
ne trancheront pas sauvagement dans les salaires. Ils se contenteront
de les distribuer à la carte, selon leur bon vouloir. L’exploitation
d’une position dominante a cependant ses limites. Les journalistes ne
sont pas les nouveaux prolétaires et leurs déboires ne susciteront pas
plus de compassion que les préoccupations des anciens pilotes de
Crossair. Mais à égalité de formation et de titres – le plus souvent
universitaires – la profession paie mal. Les talents pourraient bien un
jour la bouder.
Sacrifices salariaux
L’indexation des salaires est supprimée. A cette exigence fondamentale
qui n’était pas négociable, les éditeurs ont écrit une nouvelle grille
fixant les salaires de la 1ère à la 15e année. Ce remaniement complexe
propose quelques faibles majorations et de gros sacrifices. Exemple
pour un salaire mensuel brut :
1ère année 5 700 + 41
8ème année 6 800 – 412
11ème année 7 300 – 466
Le projet prévoit que les salaires acquis ne seront pas abaissés. C’est
leur évolution avec l’âge qui est en cause. En 15 ans, la perte cumulée
de salaire représente 36 000 francs, somme à laquelle il faut ajouter
la non-indexation.
Et si l’envie vous prend de passer de l’autre côté de l’écran, DP est ouvert aux nouvelles collaborations: prenez contact!