Le résultat du vote populaire avait été sans appel. Le 9 février 2003,
tous les cantons et 70,4% des votants acceptaient la révision des
droits populaires. La principale innovation de cette réforme était
l’introduction de l’initiative populaire générale dans la Constitution.
DP avait d’emblée émis des doutes sur la pertinence de cette révision
(cf. Votations fédérales: Trompe – l’oeil , Delley Jean-Daniel (jd), DP n°1544, du 17 Janvier 2003). L’initiative générale devait permettre de proposer
une modification d’une loi fédérale, ce qui n’est pas possible
actuellement. Toutefois, le choix de modifier la loi ou la Constitution
revenait au seul parlement. Aux seuls députés aussi de traduire dans un
texte normatif l’idée générale de l’initiative. Quitte à récolter 100
000 signatures, les initiants auraient sans doute continué à opter pour
l’initiative constitutionnelle entièrement rédigée. Mais ces critiques
techniques n’ont pas dissuadé le constituant d’accepter ce nouveau
droit populaire.
Trois ans plus tard, l’initiative générale n’est pas sous toit. Le
projet de législation d’application transmis aux Chambres fédérales a
révélé toute la complexité de cette institution. Face à ce résultat, la
commission des institutions politiques (CIP) du Conseil national a
décidé à une courte majorité de ne pas entrer en matière. Conséquence
logique de ce choix : dès lors qu’elle refuse de concrétiser la réforme
votée par le peuple en 2003, la CIP va proposer au Parlement de revenir
en arrière. Le souverain devra peut-être retourner aux urnes pour
défaire ce qu’il a fait en 2003.
La méthode a de quoi surprendre au pays du peuple qui a toujours
raison. En effet, la CIP envisage tout bonnement de ne pas appliquer la
révision de la Constitution que plus des deux tiers des citoyens ont
acceptée. Un vote, aussi discutable soit-il, ne saurait être totalement
privé d’effets. Il serait plus conforme aux institutions que le
parlement concrétise la disposition constitutionnelle en adoptant la
loi d’application. Si l’initiative générale reste lettre morte après
son entrée en vigueur, il sera alors toujours temps d’en proposer
l’abrogation : l’évaluation législative peut permettre de conclure
qu’un vote du souverain était inopportun.
Sur le plan politique, ce «nouveau droit d’initiative inutile et
compliqué» (cf. Démocratie directe : Un nouveau droit d’initiative inutile et compliqué , Jean-Daniel Delley (jd), DP n°1693, du 16 Juin 2006), disparaîtra certainement dans la même
indifférence qui avait marqué son adoption. En des lendemains de
votations qui déchantent, le refus devant l’obstacle de la CIP démontre
qu’un vote populaire ne clôt pas définitivement la discussion politique
sur un sujet. Même lorsqu’un objet a été accepté par plus de deux tiers
des votants.
Et si l’envie vous prend de passer de l’autre côté de l’écran, DP est ouvert aux nouvelles collaborations: prenez contact!