Quand, le 22 septembre 2002, le peuple a refusé la Loi sur le marché de
l’électricité (LME), il a donné une réponse claire, celle du non à la
libéralisation telle que proposée. Pour autant, il n’a pas clarifié la
situation. Car le Tribunal fédéral a confirmé que s’appliquait la loi
sur les cartels, que ce secteur devait donc être soumis à la
concurrence. Aussitôt les cantons (Vaud, Fribourg) ont, dans l’urgence,
voté des lois instituant, ou plutôt confirmant, le monopole pour
quelques années encore, sans que la constitutionnalité de cette
décision soit assurée. Enfin, l’importance du transport transfrontalier
a été révélée par la panne qui, à partir du Lukmanier, a paralysé
l’Italie. De surcroît, l’Union européenne franchit la dernière étape,
celle de la libéralisation complète. Pour toutes ces raisons, il
n’était pas possible après le vote du peuple de classer le dossier. Il
fallait reprendre l’ouvrage. Même les opposants à la LME l’ont admis en
participant à une commission d’experts chargée de faire des
propositions pour une nouvelle mouture de la loi.
Cette commission a su trouver un compromis, ce qui est remarquable sur
un sujet où s’affrontent les idéologies. Elle a proposé l’ouverture à
la concurrence pour les gros consommateurs, au-dessus de 100 mégawatts,
soit 55% du marché. Une libéralisation plus complète ferait l’objet
d’une nouvelle loi soumise à référendum. Le département de Moritz
Leuenberger, heureux de cette faisabilité politique, soumet la
proposition au Conseil fédéral. Coup de barre du gouvernement :
libéralisation pour toutes les entreprises, seuls les ménages
attendront la deuxième étape. Telle est la teneur du Message adressé
aux Chambres.
Mais les parlementaires étaient déjà à l’ouvrage. Une sous-commission
de la Commission de l’environnement, de l’aménagement du territoire et
de l’énergie (CEATE) préconise, à la majorité, la libéralisation totale
et immédiate. Dans le débat qui s’ouvre aux Chambres, cette position
est majoritaire au vu des décisions des groupes.
Si, au terme de la procédure et l’examen ultérieur par le Conseil des
Etats, cette libéralisation immédiate devait être confirmée, un nouveau
référendum est certain, avec les mêmes arguments et le même succès. Une
votation populaire, comme celle de 2002, c’est une décision, mais aussi
une consultation grandeur nature. Ne pas en tenir compte confine à
l’obstination butée et bâtée, au mépris du faisable, qui est pourtant
la règle première de la politique en démocratie directe.
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