La révision de la Loi sur les brevets est en consultation jusqu’à fin avril. L’industrie pharmaceutique met le paquet pour éviter les importations parallèles et pour protéger les inventions biotechnologiques.
Les laboratoires pharmaceutiques ont les moyens. Ils inondent les rédactions et les bureaux des décideurs politiques d’une luxueuse brochure pour justifier leurs vues sur la protection des brevets. L’argumentaire est bien connu. L’industrie pharmaceutique prospère est un joyau de l’économie suisse et profite à l’ensemble du pays. L’indispensable recherche scientifique coûte cher. Elle doit être protégée en Suisse par une rigoureuse loi sur les brevets. Les deux grands patrons de la chimie bâloise se partagent la tâche pour défendre deux points chauds de la révision en cours.
Consensus entre économie et politique
Franz Humer, président du Conseil d’administration de Roche affirme qu’une puissante protection par les brevets est la condition « sine qua non » pour le développement de la biotechnologie. Sa position est confortable. Elle appuie simplement le projet fédéral en consultation qui s’aligne sur les dispositions européennes. Malgré ce consensus entre autorités politiques et économiques, il faut s’attendre à une rude bataille avec les militants qui, depuis plus d’une décennie, s’opposent bruyamment au « brevetage des êtres vivants ».
La vertu des prix chers
Daniel Vasella, président du Conseil d’administration de Novartis, met en garde contre les méfaits de l’importation parallèle des médicaments. L’industrie suisse se défend bec et ongles contre cette importation qui pourrait influencer, vers le bas bien sûr, le prix des médicaments. Pour Vasella, notre industrie pharmaceutique est prospère parce que la Suisse a la sagesse de ne pas imiter les pays de l’Union européenne qui
« se plient au diktat unilatéral de la maîtrise des coûts ». Autrement dit, en baissant le prix des médicaments, on fait du tort au pays.
L’industrie pharmaceutique a subi un léger revers avec l’entrée en vigueur de la révision de la Loi sur les médicaments. Depuis le premier janvier de cette année, elle autorise l’importation de médicaments génériques, ceux qui ne sont plus protégés par un brevet. « Monsieur Prix » et l’Office de la concurrence voudraient que cette autorisation soit aussi valable pour les médicaments de marque. Mais l’actuelle Loi sur les brevets ne le permet pas. Ainsi, selon une interprétation du Tribunal fédéral, un médicament Novartis commercialisé en France n’a pas le droit de concurrencer le même produit sur le marché suisse. La socialiste Simonetta Sommaruga s’apprête à ferrailler durement au Parlement pour que la révision de la Loi sur les brevets autorise expressément la concurrence étrangère des médicaments de marque.
Ce nouveau pas est important. L’autorisation d’importation parallèle accordée aux génériques n’est qu’un écran de fumée. Les médicaments hors brevet ne représentent qu’un petit 3 % du marché et les différences de prix entre la Suisse et l’étranger sont réduites. L’intérêt de l’opération est minime, d’autant plus que l’obligation de joindre une notice dans les trois langues nationales présente un obstacle coûteux. Il en irait tout autrement en revanche pour les médicaments protégés par un brevet, bien plus chers en Suisse et qui font la grande masse du marché. L’importance de l’enjeu, pour les laboratoires pharmaceutiques, justifie largement la diffusion d’une belle brochure en quadrichromie. at
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