D’Outre-Sarine, une analyse du rejet de l’assurance maternité.Sous la plume de Claudia Honegger, professeur de sociologie à l’Université de Berne, ces réflexions à propos du rejet du projet d’assurance maternité dans Das Magazin n° 25, supplément hebdomadaire du Tages Anzeiger (26.6.99) :
« [ ?] Pour la Suisse romande et le Tessin, l’introduction de l’assurance maternité était une évidence, une modernisation à effectuer et une adaptation aux normes et aux valeurs des pays européens et du monde. De plus ces deux régions sont plutôt branchées sur la tradition française. Une tradition dans laquelle le droit au travail figure en première place ; non pas le travail comme un mal nécessaire ou un moyen luxueux de réalisation de soi mais comme fondement de l’intégration des citoyennes et des citoyens dans l’espace public de la cité. En Suisse romande et au Tessin, les possibilités de garde des enfants sont considérablement meilleures et le nombre de femmes travaillant à plein temps plus élevé.
» Les médias alémaniques ont expliqué le fossé entre la Suisse latine et la Suisse germanophone par une attitude différente de la première à l’égard des prestations de l’État, par une mentalité de profiteurs. Mais on peut aussi penser qu’il s’agit d’une conception plus égalitaire de la politique de redistribution et que la concurrence entre les sexes et les générations y est moins prononcée.
» De plus, les recettes néo-libérales de la déréglementation semblent y rencontrer plus de scepticisme. Enfin, la Suisse romande a pris plus conscience que la principale menace contre l’État social réside dans l’évolution démographique, le recul du taux de natalité (1,5 enfant par femme) et dans le grand nombre de femmes sans enfant (plus de 20 %). C’est pourquoi tout doit être entrepris pour favoriser la compatibilité entre activité professionnelle et fonction parentale.
En Suisse alémanique par contre, ces deux choix de vie sont toujours et encore présentés comme exclusifs. Au pragmatisme romand répond un moralisme alémano-protestant pour qui la maternité est à la fois vocation et profession. L’activité professionnelle d’une mère n’est pas un droit de la personne à l’autodétermination et à l’indépendance financière mais comme un pis-aller ou encore le moyen de réalisation de soi de femmes égoïstes, ce qui conduit tout droit à délaisser enfants (et époux) [ ?] ».
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