Les séries policières à la télévision me paraissent fort intéressantes. Soit en allemand Derrick, Der Alte, Ein Fall für zwei. En français: Navarro et Julie Lescaut, contentons-nous de ces deux-là.
Première remarque. Tant Derrick que Le Commissaire Kress (pour lequel j’ai un faible, parce qu’il ressemble à mon vieux maître Charles Gilliard, dit «le Sec», directeur du Gymnase de la Cité, puis professeur d’histoire à l’Université) sont des policiers de bonne compagnie, très corrects, ne recourant jamais à la violence. Le Commissaire Kress a plusieurs inspecteurs sous ses ordres, dont un Noir, très «smart», fruit des amours, sans doute, d’un GI et d’une jeune Allemande, qu’on sent parfaitement assimilé et qui donne comme ses camarades une idée très favorable de la police.
De ce point de vue, si Navarro et Julie Lescaut donnent eux aussi une idée favorable de la police, il n’en va pas de même de leurs adjoints Ð leurs «mulets» dans le cas de Navarro, qui sont gens à problèmes (sexuels), l’un attaché à sa mère de manière infantile et ne parvenant pas à se trouver une petite amie; l’autre passant son temps à sauter toutes les femmes qu’il rencontre; le troisième, un Noir, fort sympathique lui aussi, mais présenté comme un grand enfant, susceptible du meilleur comme du pire. Quant à son supérieur hiérarchique, c’est un imbécile dont il n’y a rien à dire, sinon qu’il est l’amant de la femme du préfet…
Il en va de même des adjoints de Julie Lescaut laquelle consacre une bonne partie de son temps à apaiser leurs conflits sentimentaux. Là encore, un Noir, très sympatique, mais lui aussi enfantin.Ajoutons que tant Navarro que Julie Lescaut sont divorcés et ont respectivement une et deux filles, qui leur causent pas mal de joie et de souci.
Deuxième remarque. Si au niveau des policiers, la sexualité joue un grand rôle, tant dans Navarro que dans Julie Lescaut, il n’en va pas de même dans Derrick ou dans Der Alte. Ces derniers semblent des célibataires endurcis, sans «aventures» ni maîtresses.
Troisième remarque. Jamais, dans Der Alte, Ein Fall für zwei ou Derrick, la société n’est mise en cause. Ein Fall für zwei propose, il est vrai, un avocat dont la spécificité est de prouver avec l’aide d’un détective privé que celui qu’on suspectait est innocent, et de découvrir le vrai coupable… Mais le juge d’instruction ou le policier reconnaît son erreur avec la meilleure grâce du monde et félicite l’avocat pour son travail!
Au contraire, dans Navarro comme dans Julie Lescaut, on découvre le plus souvent qu’il y a un ou plusieurs policiers ripoux; un haut fonctionnaire de la police ou de la justice qui joue double jeu; un cadre supérieur d’une grande entreprise qui est le coupable, ou qui a commandité le crime. Si bien que systématiquement, le discrédit est jeté sur la police, sur la justice, sur la société française toute entière!
Faut-il conclure qu’une telle vue est le reflet hélas exact de la réalité? Ou alors que les responsables de la TV française se font un plaisir de scier la branche sur laquelle ils sont assis? Jeanlouis Cornuz
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