Reconnaissons que les accords bilatéraux représentent une stratégie de rattrapage. Il lui manque une véritable dimension politique.
La Société pour le développement de l’économie suisse a déjà lancé une importante campagne pour défendre les accords bilatéraux. L’axe de bataille est clair : les accords bilatéraux ne concernent que la vie économique et n’ont pas d’implications politiques. On peut donc les approuver tout en étant opposé à l’adhésion à l’Union européenne. Ë court terme, le calcul est limpide : il s’agit de s’allier les milieux économiques antieuropéens, auxquels on présente les accords bilatéraux comme le meilleur moyen de ne pas adhérer à l’Union.
La cohérence politique exigerait au contraire de présenter ces accords pour ce qu’ils sont, à savoir la mise en œuvre progressive d’une timide stratégie de rattrapage. Sortant de plusieurs décennies d’auto-isolation, la Suisse s’insère par étape dans les institutions internationales : après le Fonds monétaire, l’Organisation mondiale du commerce, le Partenariat pour la paix, l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe et, avec les récents accords bilatéraux, le Marché unique européen, viennent logiquement l’Union européenne et l’ONU.
Contre la logique du profit
L’adhésion à l’UE apporterait à la Suisse la dimension politique et culturelle qui manque dans les accords bilatéraux : en participant de plein droit à l’Union, la Suisse ne participerait pas seulement aux décisions. Par son adhésion, elle reconnaîtrait enfin les valeurs de paix et de solidarité qui animent l’Europe. La Suisse pourrait renforcer la position des États européens face aux multinationales. Au niveau mondial, l’UE est en effet la seule superpuissance qui se bat pour défendre la culture, la solidarité et l’environnement face à la logique pure du profit.
Un tel discours rejoindrait les préoccupations des milieux qui se battent pour protéger les Alpes. Il apporterait une réponse nettement plus solide et crédible à tous ceux que le vent âpre de la globalisation menace. Ce sont en effet leurs craintes justifiées et légitimes qui appellent les mesures d’accompagnement. Mais l’on sent bien qu’en fin de compte, les accords bilatéraux ne sont qu’une bonne occasion pour obtenir quelques maigres « mesures d’accompagnement de la globalisation ». Ainsi remises en perspective, ces mesures ne seront guère plus qu’une goutte d’eau sur une pierre chaude, car elles n’ont aucune emprise sur les causes d’un mal qui n’a du reste pas grand-chose à faire avec les accords bilatéraux.
Dans une démocratie semi-directe, les politiciens doivent vouer une attention toute particulière à la dimension morale et philosophique des questions qui se posent, sans quoi la machine se grippe. Nier systématiquement cette dimension et se limiter à l’épicerie économique ne peut tenir lieu de stratégie. r n
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