«Vers 700 ans avant Jésus-Christ, une invention capitale s’est produite en Grèce : l’alphabet. Selon les grands spécialistes de l’Antiquité [ ?], c’est sur cette technique conceptuelle qu’a reposé le développement de la philosophie et de la science occidentales [ ?].
Médias et langage
« Ce tournant historique avait été préparé par quelque 3000 ans d’évolution de la tradition orale et de la communication non alphabétique, jusqu’à ce que la société grecque accède à un nouvel état d’esprit, Ü l’esprit alphabétique Ý, qui a précipité la transformation qualitative de la communication humaine. Même si l’alphabétisation ne s’est généralisée que des siècles plus tard, après l’invention et la diffusion de la presse à imprimer et l’essor de la fabrication du papier, c’est bien l’alphabet qui, en Occident, a fourni l’infrastructure mentale de la communication cumulative, fondée sur le savoir.
« [ ?] Une transformation technologique d’une ampleur historique comparable se produit 2700 ans plus tard : l’intégration de différents modes de communication au sein d’un même réseau interactif. Pour la première fois, un supertexte et un métalangage intégrent dans un même système les modes écrit, oral et audiovisuel de la communication. L’esprit humain rassemble toutes ses dimensions dans une interaction nouvelle entre les deux lobes du cerveau, les machines et les contextes sociaux [ ?].
« L’intégration potentielle de textes, d’images et de sons en un même système, interagissant à partir de multiples points, dans un temps choisi (réel ou différé), au sein d’un réseau global auquel on peut accéder librement et à faible coût, transforme fondamentalement en effet le caractère de la communication. Or la communication modèle la culture de manière décisive, dans la mesure où [ ?] nous ne voyons pas la réalité telle qu’elle est mais telle que sont nos langages. Et nos langages sont nos médias. Nos médias sont nos métaphores. Et nos métaphores créent le contenu de notre culture ».
Manuel Castells, La société en réseaux. L’ère de l’information, Paris, 1998, Fayard.
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