Les chambres fédérales devront traiter cet hiver de l’étrange loi SPIN, ou loi fédérale sur les identificateurs sectoriels de personnes. L’acronyme est anglais, le titre abscons, mais le sujet est clair : identifier les habitants du pays par des numéros stables et non signifiants. Contrairement au numéro AVS qui peut varier et qui fournit plusieurs informations sur un individu, les identificateurs seront des suites de chiffres aléatoires qui accompagneront le titulaire tout au long de sa vie.
Mais la simplicité n’est pas la vertu cardinale de l’administration fédérale et nous ne pouvons résister au plaisir de citer quelques phrases de la présentation du projet destinée à la procédure de consultation : «bien des pays, par exemple les pays scandinaves ( ?) ont créé un identificateur de personnes unifié pour toute l’administration. Considérant le danger potentiel que des échanges illégaux ou abusifs de données constituent pour la protection de la personnalité, nous ne voulons pas aller aussi loin que ces pays. Nous proposons pour la Suisse un système d’identificateurs sectoriels, plus coûteux et un peu moins performant sur le plan administratif, mais plus conforme aux impératifs de la protection de la personnalité».
De fait le projet de loi prévoit six secteurs: population, poursuite pénale, statistique, défense nationale, fiscalité, assurance sociale. Chaque habitant de ce pays se verra donc affubler d’au moins quatre numéros différents (à supposer qu’il ne subisse pas de poursuite pénale et qu’il soit hors du système de défense). Cette loi s’appliquera à tous les registres cantonaux et communaux des habitants (art. 2).
Afin que des échanges de données soient possibles d’un secteur à l’autre, il est prévu un serveur d’identification (art.4) géré par le Département fédéral de justice et police (DFJP) qui permettra le passage d’un secteur à l’autre des données d’un individu. Les registres cantonaux et communaux des habitants seront obligatoirement reliés à ce serveur central. Le DFJP gère les droits d’accès du serveur et il est précisé qu’il n’a pas accès aux données échangées.
Les coûts d’investissement sont fixés à 6,5 millions de francs pour les secteurs population et statistique qui font l’objet de la première étape jusqu’en 2009. La procédure de consultation n’a suscité que très peu d’oppositions. La plus marquante est celle du préposé fédéral à la protection des données qui, au-delà des arguments juridiques, insiste sur le fait qu’il est anormal qu’un département, le DFJP, puisse ainsi gérer l’ensemble des échanges de données des administrations helvétiques. Il souhaite qu’un organe indépendant soit responsable du serveur d’identification.
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