Le domaine de la santé au travail est un trou noir en Suisse. Absence de politique fédérale, manque de données statistiques, intérêt mitigé des médias. Les rares spécialistes sont contraints d’extrapoler sur les chiffres provenant des pays voisins en supposant qu’ils reflètent également notre situation. Bien sûr la SUVA (assurance accidents) publie de nombreuses informations, mais elles ne reflètent pas la situation réelle.
De nouvelles pathologies émergent, comme les TMS, les troubles musculo-squelettiques, autrement dit les innombrables «mal au dos», tendinites et inflammations musculaires diverses qui frappent non seulement le monde ouvrier, mais aussi les employés de bureau. Ces troubles sont souvent pris en charge par l’assurance maladie individuelle des cols blancs et n’entrent pas dans les catégories de la SUVA. Les coûts globaux engendrés par ce type d’affection représenteraient en Europe la moitié des dépenses engendrées par les problèmes de santé d’origine professionnelle, soit près de 2% du PNB, ce qui est gigantesque !
L’absence d’intérêt des médias et du monde politique est d’autant plus étrange que les frais liés aux problèmes de santé au travail jouent probablement un rôle non négligeable dans l’explosion des coûts des assurances maladie, mais ce sujet intéresse moins que le prix des médicaments ou le moratoire sur l’ouverture de cabinets médicaux. Nous n’avons aucune institution fédérale traitant de ces problèmes si ce n’est la SUVA, qui n’est après tout qu’une assurance. L’OFSP (Office fédéral de la santé publique) n’a aucune section traitant de la santé au travail.
En Suisse romande, l’institut universitaire romand de la santé au travail (IURST) accomplit un travail important, mais il reste isolé. On pourrait penser que ce thème mobiliserait les parlementaires, surtout ceux de la gauche, mais ce n’est même pas le cas. Il est vrai que les immigrés qui occupent les emplois où les risques sont les plus grands comptent avant tout sur l’action syndicale, comme le montre le récent conflit autour de l’accord sur les retraites dans le bâtiment, et la grande masse des employés du tertiaire vit dans un univers individualiste peu propice à l’émergence d’intérêts collectifs. jg
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