Nouvelles lignes TGV et autres cadences des CFF, les paradoxes du progrès des transports en commun.
La dernière fin de semaine a été marquée par un remarquable tohu-bohu d’événements. Entre autres, les changements dans les chemins de fer ne sont pas forcément les moindres. L’inauguration de la ligne TGV entre Valence et Marseille chez nos voisins, la cadence à la demi-heure entre le Léman et Zurich ne sont pas de simples exercices de marketing ferroviaire. Ils peuvent modifier en profondeur la distribution des activités sur un territoire. Le concert de louanges face aux prouesses technologiques est justifié; le coup d’oeil un peu critique s’impose également.
Un spécialiste des transports, Yves Crozet, a livré au journal Le Monde du 6 juin des réflexions qui méritent d’être signalées, même si la situation de nos deux pays n’a rien de comparable. Il souligne que la présence d’une ligne à grande vitesse entraîne un pompage des zones défavorisées vers les régions favorisées. Loin de stimuler le développement des activités économiques sur son parcours, le TGV suscite un mouvement des hommes et des femmes qui partent travailler dans la capitale, même s’ils résident fort loin, et les villes desservies deviennent de simples lieux de résidence. Par exemple, les Marseillais n’apprécient pas forcément de voir affluer dans leur dos des Lyonnais en mal de soleil.
Risque de concentration
Bien sûr, la situation helvétique est fort différente. Nos villes sont des véritables centres de décision, ce que sont moins les agglomérations françaises face à Paris. Mais l’effet de pompage existe malgré tout. Plus le temps de parcours vers Zurich diminue avec une cadence qui dispense de se préoccuper des horaires et plus la tentation de concentrer réunions et décisions dans la capitale économique du pays deviendra forte. Le risque de concentration des centres de pouvoir est un paradoxe de l’amélioration des transports en commun.
L’universitaire français évoque le risque du renforcement des inégalités dans les modes de vie. Il fait remarquer qu’il devient possible à un Parisien aisé de passer des week-ends dans une maison en Provence avec une voiture qui l’attend à chaque terminus ferroviaire et les conséquences que l’on imagine sur l’immobilier et la circulation. Il s’agit là d’une hypothèse de travail et toute transposition en Suisse est aléatoire. Mais on ne peut exclure des évolutions similaires. Il sera peut-être attrayant de prendre sa voiture pour quitter la Goldküst survolé par Swissair, la déposer près d’une gare, prendre le train pour Lugano et récupérer un autre véhicule afin d’encombrer au maximum les étroites vallées tessinoises. Là encore, pure hypothèse de travail, mais à ne pas entièrement négliger pour autant jg
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