A la Galerie Pauli, à Lausanne, sont exposées les dernières toiles de Soulages.
Balthus et Soulages, l’un est presque centenaire, l’autre a fêté ses huitante années. Ils sont, de manière incontestée, les plus grands peintres français vivants. Les musées de tous les continents leur ont déjà rendu hommage par ces rétrospectives que l’on réserve généralement plutôt aux morts qu’aux vivants. Si l’œuvre de Balthus est sans doute achevée, la capacité créative de Soulages est intacte. On peut le voir ces jours à la galerie Alice Pauli à Lausanne, qui présente des toiles récentes.
Peintre français, disions-nous. C’est l’épithète accolée à Matisse par Aragon. Elle est synonyme de bonheur, de joie de vivre et d’élégance. Tous ces qualificatifs s’appliquent à Soulages alors qu’on ne pourrait les attribuer aux œuvres sombres et pessimistes des artistes allemands ou anglais si cotés aujourd’hui. Il y a quelque paradoxe à parler de bonheur lorsque l’on sait que l’œuvre de Soulages tourne entièrement autour du noir, mais les reliefs de ses tableaux ne sont là que pour mettre en valeur la lumière et ses reflets. Rien de plus gai et harmonieux que ces immenses toiles obscures aux ondulations lumineuses.
Chez Alice Pauli justement, et après trente ans de noir intégral, Soulages, à huitante ans sonnés, change, évolue, introduit soudain le blanc, de longues bandes qui évoquent de nouveaux rythmes et créent la rupture.
Une créativité intacte
Les formats se rapetissent, les toiles gagnent en densité expressive. Des reflets bleus ou jaunes apparaissent. L’acryl n’est plus la seule matière utilisée. Dans une salle, d’admirables petits formats au brou de noix jouent sur la dilution et la transparence. Soulages est peut-être le dernier grand représentant de l’art non figuratif du 20e siècle. Il nous dit que la peinture n’est pas morte et que l’avenir des arts plastiques n’est pas réservé uniquement à la vidéo, à la photo et aux installations techniques. Mais si vous êtes séduit et que vous voulez acheter les rares invendus qui subsistent, soyez néanmoins prêt à débourser un montant à six chiffres … jg
Soulages, peintures 1999-2000, Galerie Alice Pauli (rue du Port-Franc 9, Lausanne), tél. 021/311 01 49, jusqu’au 29 juillet.
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