Le temps de réaction du Parlement suisse est, pour le moins, lent. Il y a un an déjà que le peuple, à l’appel des cantons, rejetait le «paquet fiscal». Mais ce n’est qu’à cette session d’été que le Conseil national en a débattu. Quelle leçon tirer de cet échec ? Une des composantes du paquet concernait l’imposition du couple. C’était une mise en forme d’une exigence du Tribunal fédéral. Dans un jugement, il avait considéré qu’un couple marié ne pouvait pas être imposé plus fortement que deux concubins disposant du même revenu. Le jugement date de 1984. Il tourne à petite vitesse, le monde législatif helvétique.
Le Conseil national a, cette fois-ci, fait un choix apparemment clair. Après débat, il a retenu l’imposition indépendante de l’état civil. Chacun est taxé individuellement, selon son revenu et sa fortune. Le vote fut net : 114 pour, 53 contre. Socialistes et radicaux constituent le noyau de cette majorité. La détermination politique devrait donc entraîner une exécution rapide. Nenni ! probablement, rien ne sera mis en place avant dix ans. Et encore ?
Les cantons ont fait savoir que l’intendance n’est pas en mesure de suivre. Leur administration fiscale devra analyser un million de déclarations supplémentaires de revenus, un million de demandes de ristourne de l’impôt anticipé, sans parler de la difficulté juridique de répartir entre deux conjoints la fortune commune. Comme on ne peut pas attendre dix ans, il faut introduire des allégements immédiats ; et le PDC revient avec la vieille formule du «splitting», espérant un provisoire définitif.
Mais Hans-Rudolf Merz, que dit-il ? Qu’il va présenter d’abord un projet soulageant les actionnaires, qu’il prendra en considération l’allégement du couple, mais dans un cadre financier global raisonnable. Par quoi il faut comprendre que le pain donné aux actionnaires sera pour une part enlevé de la bouche de la famille.
En fin de compte, le National s’est livré à un exercice théorique au lieu de faire de la politique pratique. Elle aurait exigé qu’il fixe une date limite pour la mise en application de l’imposition individuelle et qu’il choisisse lui-même ses priorités, l’allégement des actionnaires n’étant ni urgent, ni même justifié. Mais cette politique n’aurait pas recueilli la même majorité trompeuse, car la vérité politique est pratique, c’est-à-dire qu’elle se juge à l’action. ag
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