La campagne des automnales élections fédérales se met en place dès le printemps : rituel des congrès et premiers sondages qui n’annoncent pas des bouleversements sismiques. Toutefois l’incroyable regroupement des votations du 18 mai, qui inspire aux partis des mots d’ordre simplificateurs, sept fois oui ou sept fois non selon une confrontation gauche – droite, révélera peut-être un ou deux thèmes porteurs. Pour le reste, les partis annonceront des programmes fidèles à leur image : sécurité, contrôle de l’asile, équilibre des finances publiques, consolidation des assurances sociales, meilleure redistribution du revenu national. Moins classique, la faillite entrepreneuriale de quelques dirigeants radicaux ou l’inconvenance de la rétribution salariale de hauts managers seront probablement sanctionnées. La Goldküste perdra son privilège de quartier tranquille et doré de la classe dirigeante suisse.
Mais en 2003, ce qui frappera avant tout, notamment en comparaison avec les élections antérieures, c’est l’absence de tout débat sur l’adhésion à l’Union européenne. Si le sujet est évoqué, ce ne sera que pour mémoire. Les raisons de cette mise en parenthèse sont connues. La Suisse, expliquera-t-on, a choisi la voie du bilatéralisme. Les premiers accords commencent seulement à déployer leurs effets ; il faut aller jusqu’au bout des dix ans de leur première application. La nouvelle série est toujours en négociation ; d’abord conclure. Vouloir aujourd’hui réactiver la demande d’adhésion saperait le travail patient des négociateurs. Pourquoi, diront leurs partenaires européens, chipotez-vous pour aménager telle disposition alors que vous devrez l’accepter intégralement avec tout l’acquis communautaire, si vous adhérez, ce que vous prétendez désirer ? Si la droite obtient une sauvegarde correcte, à ses yeux, du secret bancaire, elle ne voudra pas la remettre en question par une adhésion. Et adhérer à quelle Europe, politiquement éclatée depuis la guerre en Irak et en recherche laborieuse de la constitution qui la régira ? Mais la gauche a, de son côté, pris ses distances. Elle fait de la défense du service public un combat prioritaire. Or, l’Union européenne a choisi de faire sauter les monopoles nationaux pour mieux créer un grand marché européen. Il y a incompatibilité des visées. La contradiction est apparue au grand jour dans le refus de la Loi sur le marché électrique. Les opposants acceptaient de faire un choix antieuropéen. Comment pourraient-ils réclamer une adhésion rapide alors qu’elle signifierait qu’ils renoncent à leur victoire (acquise d’ailleurs avec un appui déterminant de l’électorat UDC).
La ligne du Parti socialiste fut pendant longtemps de promouvoir les réformes qui rendraient plus facile l’adhésion. S’il la maintient, il devrait soutenir tous les efforts qui tendent à rendre les anciennes régies plus compétitives. Il devrait proposer des modèles de régulation pour que les entreprises concurrentes autorisées à intervenir dans un domaine autrefois protégé ne puissent pas seulement pratiquer dans les zones de bonne rentabilité, éludant les charges d’un service complet au public, géographique et pratique. Le parti retenu est-il avant tout de résister, donc de défendre le statu quo ou d’orienter les réformes qui accompagnent la fin des monopoles ? Cette clarification, le PS nous la doit. Il ne peut tenir simultanément deux langages : pour une adhésion rapide à l’Union européenne et contre des mesures qui faciliteraient ou prépareraient l’adhésion. Quel est son choix ?
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