Quand Economiesuisse, sur un sujet soumis à votation met le paquet (celui des millions payant la propagande), elle ne perd pas. Elle a pourtant perdu. La corrélation a été démentie. Pour elle, mais aussi pour le Conseil fédéral, pour une très large majorité du Parlement et pour un nombre impressionnant d’associations. Le succès de la gauche syndicaliste et socialiste est d’autant plus relevé, même s’il a aussi été obtenu avec l’appui de défenseurs d’intérêts locaux, de notables attachés aux situations acquises et de cantons connus pour leur traditionalisme.
Le contexte de cette votation lui a donné sa portée idéologique ; affaires du second pilier, indemnités de départ des managers congédiés, Swissair bien sûr ; les opposants ne manquaient pas de bois pour faire des flèches. Et sur le fond du sujet, les consommateurs ordinaires ne voyaient pas ce qu’ils auraient à y gagner, les économies attendues de la concurrence allant aux gros et moyens consommateurs.
Que faire de cette victoire ? Le résultat donne aux vainqueurs à la fois une légitimité et aussi une responsabilité. Car le statu quo n’est pas satisfaisant, ni d’un point de vue économique, ni selon les critères d’un vrai service public.
Rappels
L’électricité est une marchandise, et elle a un prix. La «marchandisation» a déjà eu lieu, et depuis longtemps. On a dit que l’électricité ne se stockait pas, mais les barrages hydrauliques sont une forme de stockage qui permet à la Suisse de vendre de l’énergie de pointe sur le marché européen, dont elle ne peut pas s’isoler. Or l’Union européenne ouvre son marché aux grandes et moyennes entreprises ; il sera difficile à la Suisse de rester à l’écart pour des raisons commerciales. Le dossier, qu’on le veuille ou non, n’a pas été clos par la votation du 22 septembre.
Les acquis du débat
Dans l’idée qu’il faudra bien remettre l’ouvrage sur le métier, voilà les points repérables d’un accord minimal.
Unifier l’ensemble du transport à haute tension en une seule société d’intérêt public. Accepter, comme l’admettait Daniel Brélaz, l’ouverture du marché pour les gros consommateurs. Imposer la transparence du coût facturé : prix de production, prix du transport, provenance. Permettre aux consommateurs de choisir des énergies vertes. Ces mesures peuvent-elles être mises en place par accord entre les entreprises ou une deuxième mouture de la loi est-elle nécessaire et possible ?
Plus de mille sociétés pour gérer le marché de l’électricité fait penser à la Suisse d’avant 1848, même si la proximité a ses vertus. Les syndicats ont à se préoccuper aussi de la compétitivité des entreprises suisses qui opèrent sur un marché intérieur aux prix élevés : elles sont pourvoyeuses d’emplois.
La gauche qui a mené, avec succès, la bataille de la LME doit donner sur ce sujet un sens à sa victoire. Avec quelles propositions ? Est-elle «statu quoïste» ou réformiste? ag
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