Reprenons les dates, les intentions et les effets
d’annonce. Le Conseil fédéral a déclaré qu’il dégèlerait la demande
d’adhésion à l’Union européenne lors de la prochaine législature
(2003-2007). Il justifie ce délai par la nécessité de conduire les
réformes intérieures afin de lever, préalablement et avec l’assentiment
du peuple et des cantons, les obstacles à l’adhésion. Or, il est une
date, dissimulée dans les dispositions transitoires de la Constitution
(article 13) que personne n’évoque : « L’impôt fédéral direct peut être
prélevé jusqu’à la fin de 2006 ». Autrement dit, la réforme de la
fiscalité fédérale qu’exige impérativement la Constitution sera dominée
par les contraintes européennes. Jusqu’à ce jour M. Villiger ne s’est
pas inscrit dans cette perspective et le Conseil fédéral ne l’a pas
exigé de lui. On peut douter d’ailleurs que M. Villiger soit l’homme de
cette situation exceptionnelle.
La problématique de cette réforme
est ardue. L’Union européenne exige une TVA d’au moins 15 %. Nous en
sommes à 7,6 %. Elle devrait donc doubler. Cette hausse spectaculaire
fait d’ailleurs partie de l’argumentation de base des anti-européens.
Elle devrait être affectée pour une part à nos besoins intérieurs, ceux
des assurances sociales et aussi à l’obligation de payer notre
contribution aux fonds européens, autre point de l’argumentaire
blochérien. Restent à disposition 3,5 points de TVA pour limiter, par
l’allégement d’autres impôts, la part accrue des prélèvements
obligatoires (voir dossier de l’édito). Or, l’impôt qui se prête le
mieux à une correction, c’est l’impôt fédéral direct. Mais en raison de
son assiette et de sa progressivité, il pose un problème politique aigu
: son démantèlement ou son amenuisement profiterait aux contribuables
les plus aisés, alors que l’augmentation massive de la TVA sera payée
par tous, y compris les contribuables les plus modestes. Il est
vraisemblable que la droite militera pour un démantèlement, une
initiative de l’USAM (retirée) allait dans ce sens. Mais on assisterait
dans cette hypothèse à un inadmissible déplacement de la charge
fiscale. Inacceptable pour la gauche, toutes nuances ou tendances
confondues.
Il faut donc trouver une solution qui prenne en compte
les contribuables les plus modestes. Deux pistes peuvent être
envisagées. Un allégement en francs de l’IFD, convertible pour ceux qui
n’y sont pas soumis en crédit sur les impôts cantonaux, voire en crédit
tout court (variante helvétique de l’impôt négatif). Ou prise en charge
de manière forte des cotisations d’assurance maladie, notamment pour
les familles.
L’adhésion à l’Union européenne aura un coût. Comment
le rendre acceptable ? Dès maintenant, le Conseil fédéral doit lancer
les préparatifs d’une réforme fiscale européenne cadrée par le délai
constitutionnel. Sa crédibilité, celle du respect de l’échéancier, est
en jeu. AG
Pour ne manquer aucun article
Recevez la newsletter gratuite de Domaine Public.
Et si l’envie vous prend de passer de l’autre côté de l’écran, DP est ouvert aux nouvelles collaborations: prenez contact!