L’enjeu des accords passés avec l’Union européenne est majeur. La négociation a été bien menée, étant admis que l’UE ne fait pas de cadeaux et n’a pas à nous en faire. Un refus ne renverrait pas à l’espoir d’une meilleure copie, il nous condamnerait à un isolationnisme asphyxiant et anémiant. Un « non » ne serait donc pas une manière originale de cultiver égoïstement notre quant à soi ; nous nous condamnerions nous-mêmes à sortir de l’espace du jeu communautaire. Cet enjeu est si vivement ressenti qu’une majorité de l’opinion est persuadée qu’il faudra, après la défaite de l’EEE devant le peuple et les cantons, mener victorieusement cette nouvelle bataille. Or rien de tel ne se produira. L’accord ne sera pas soumis obligatoirement au peuple et aux cantons. La Constitution est formelle sur ce point. N’est soumise à ce vote que l’« adhésion à des organisations de sécurité collective ou à des communautés supranationales » (art. 40). Il n’y aura donc ni vote obligatoire, ni majorité des cantons requise. L’article 141 s’appliquera, et, soit en raison de la nature du traité, soit par décision de l’Assemblée fédérale, le référendum ne pourra être que facultatif.
D’autre part il est exclu, pour des raisons évidentes de droit, de faire de l’accord bilatéral lui-même, de l’adaptation de la législation suisse et des mesures d’accompagnement un seul paquet, voté en bloc par les Chambres et soumis comme tel au référendum facultatif. Chaque objet devra être traité pour lui-même. En conséquence le ou les référendums ne pourront viser que la tête, autrement dit l’accord bilatéral lui-même dont tout dépend, ou telle ou telle mesure d’accompagnement. Attaquer l’accord lui-même, quelle responsabilité politique ! S’en prendre seulement à une mesure particulière, jugée par exemple insuffisante, c’est accepter que le reste de l’ensemble soit définitivement sous toit et qu’il n’y ait pas de mesure d’accompagnement, du moins jusqu’à acceptation éventuelle, très éventuelle, d’une meilleure copie.
Cette situation crée une nervosité où se mélangent la défense d’intérêts légitimes, les menaces et le bluff. Cette phase doit arriver à son terme. Certes le débat parlementaire verra naturellement les positions s’affirmer, mais que ce soit dans les limites du compromis bien pesé ! Car il ne faut pas faire la courte échelle à ceux qui rêvent qu’un référendum s’en prenne à l’accord lui-même. Ne plus perdre de vue désormais l’enjeu majeur : le refus de l’isolationnisme. AG
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