Suite du feuilleton de l’imposition des gains boursiers.Où la commission du Conseil national propose une définition si restrictive de la spéculation par métier que l’on ne va plus guère trouver de professionnels de la Bourse en Suisse.
Ë défaut d’une imposition générale des gains boursiers des personnes physiques, selon le modèle américain par exemple, dont ne veulent ni le Conseil fédéral, ni le Parlement, il était admisÊÐÊce fut un des thèmes de la table ronde fédéraleÊÐÊque l’imposition pouvait être légitime si l’opérateur agissait à titre professionnel. Mais qu’est-ce qu’un professionnel de la bourse ? La jurisprudence du Tribunal fédéral, par analogie avec le professionnel des ventes immobilières, tend à considérer qu’un contribuable spécule par métier dès que, sans autre nécessité que le gain, il procède à deux ou trois opérations, dans un délai donné, ces ventes et ces opérations n’étant pas justifiées par un usage personnel. Il n’est pas nécessaire que les gains soient la source principale des revenus pour que l’on considère qu’il y a exercice d’un métier. Dès lors l’imposition devient lourde puisque les bénéfices sont assimilés à un revenu, donc à une progressivité forte.
Cette solution a deux mérites. Elle établit une égalité de traitement avec le professionnel de l’immobilier ; elle permet de faire une distinction entre la plus-value d’un patrimoine placé en actions et la recherche intensive et spéculative de gains boursiers.
La commission compétente du Conseil national s’est saisie du sujet. Bravo, dira-t-on ! Elle va donner à la jurisprudence une confirmation législative et permettre ainsi une application large du dispositif, s’appliquant sur tout le territoire et pas à la seule initiative des administrations cantonales les plus zélées. Mais sur de tels sujets, c’est mal connaître les intentions de la majorité parlementaire et le pouvoir d’influence des banques. La commission a voulu définir les critères qui permettent de dire quand l’on agit par métier. Elle en a retenu trois : la fréquence des opérations, la brève durée de possession des titres et le recours à des financements extérieurs importants. Ce sont là des critères objectifs. Mais elle précise que ces critères doivent être cumulativement observés pour que l’on puisse considérer que le contribuable a agi par métier. Ainsi tous les boursicoteurs qui agissent avec leurs fonds propres échapperont à une taxation comme professionnels. Au lieu de donner une force extensive au dispositif, on s’apprête à le verrouiller. Comme l’affaire est très technique, même si l’enjeu est d’importance, elle échappe en conséquence au jugement de l’opinion. Pourtant, le porte-parole de l’Association suisse des banquiers, Victor Füglister, lors d’une récente conférence a tenu à féliciter la commission et à critiquer la jurisprudence confuse du Tribunal fédéral. Les Chambres traiteront ce problème lors de leur prochaine session. ag
Et si l’envie vous prend de passer de l’autre côté de l’écran, DP est ouvert aux nouvelles collaborations: prenez contact!