
Le récent refus à deux contre un de la loi sur les services d’identification électronique (LSIE) a principalement pour cause le rôle important que jouent des entreprises privées dans la transmission aux utilisateurs, c’est-à-dire aux prestataires de services en ligne, des données personnelles reçues de la Confédération.
Par leur vote, les citoyens de tous les cantons ont démontré leur aversion pour toute aliénation formelle d’un service public. En l’occurrence, il s’agit bel et bien d’un transfert de données dignes d’une protection avancée, en vue d’une exploitation le plus souvent commerciale.
Or, curieusement, le jour de la votation sur la LSIE, les citoyens du canton de Lucerne approuvaient, dans la même proportion de 65 %, un crédit de 53,5 millions de francs destiné au financement de la planification et du développement du campus de la Haute école spécialisée de Lucerne. Sis à Horw, cet important aménagement devrait accueillir dès 2030 le département Technique et Architecture dans ses locaux actuels assainis et agrandis, ainsi que la Haute école pédagogique, présentement installée sur huit sites différents en ville de Lucerne.
Le crédit d’étude et de développement précité servira à la constitution d’une Société anonyme d’intérêt public, un statut peu connu bien que dûment prévu par le Code des obligations (art.620, al.3). Elle sera dotée d’un capital entièrement versé par le canton de Lucerne, dont les représentants composeront le Conseil d’administration.
Cette réalité n’a pas empêché les élus socialistes et verts au Grand conseil de s’opposer, le 20 octobre dernier, à une opération qui leur paraissait une inadmissible privatisation. Sauf qu’ils n’ont pas fait campagne contre le décret, négligeant même de constituer un comité ad hoc.
En revanche, dans leur grande majorité, les citoyens lucernois ne s’y sont pas trompés. Ils ont compris que la fameuse SA n’était pas une manifestation du capitalisme d’État, mais tout simplement un instrument adéquat et temporaire pour financer les études préparatoires au service d’une finalité indiscutée*.
Les cas bien différents de la loi fédérale LSIE et du décret portant création de la SA lucernoise illustrent le risque de prendre certains mots, tel celui de privatisation, pour des épouvantails.
*Phrase modifiée, précisant la version PDF
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