La révision partielle de la loi sur les armes répond à un développement de la législation européenne concernant les accords Schengen-Dublin. Elle est attaquée par référendum, au motif que ce développement a été imposé à la Suisse et contribuerait à affaiblir son niveau de sécurité.
Petit rappel historique. En 2005, les Suisses ont accepté ces accords qui doivent coordonner et améliorer la gestion de la sécurité et de l’asile entre les Etats membres. Pour notre pays, Schengen facilite les déplacements, tout en renforçant les contrôles aux frontières extérieures grâce à la collaboration entre autorités. Et le traité de Dublin permet à un pays de renvoyer un requérant dans l’Etat de la première demande d’asile.
En quoi consiste cette révision que d’aucuns décrivent comme une atteinte à la liberté des Suisses de s’armer? Elle ne concerne ni l’armée ni la police. Elle n’entraîne aucun changement ni pour les détenteurs d’armes d’ordonnance ni pour les chasseurs. Par contre, la propriété d’armes semi-automatiques munies d’un chargeur de grande capacité est soumise à autorisation. Les amateurs de tir pourront continuer à détenir de telles armes, mais ils devront prouver leur usage régulier ou leur appartenance à une société de tir.
La Suisse a négocié ses conditions avec l’UE
Les opposants estiment inacceptables et inefficaces les restrictions imposées par cette révision. Mais leur démarche relève d’abord d’une opposition de principe à l’Union européenne (UE). L’UDC est le seul parti national à soutenir le référendum, lancé par certains de ses membres.
Les référendaires assimilent cette révision à une attaque contre la liberté des Suisses de détenir une arme et à une soumission de notre pays à un diktat de l’UE. Pour l’UDC, toute décision prise en relation avec l’UE doit être combattue au nom de la défense de notre indépendance nationale. Le référendum est donc clairement un moyen pour l’UDC de s’attaquer aux accords avec l’UE.
Cette réforme n’est pas davantage «imposée» à la Suisse qu’aux autres pays membres du système Schengen. La Confédération a été associée aux discussions menées entre Etats, avec un droit de participation à la prise de décision. Elle a pu faire valoir avec succès ses intérêts et ses spécificités, puisque rien ne change pour les détenteurs des armes militaires et de chasse. Quant au «coût» de la révision, il se limite à une démarche pour faire inscrire des armes dangereuses dans un registre cantonal.
En revanche, la facture risque d’être élevée en cas de refus. L’accord d’association à Schengen décrit une procédure complexe au terme de laquelle, si la Suisse n’est pas en mesure d’appliquer les modifications prévues, l’accord pourrait simplement cesser de s’appliquer, sauf décision contraire expresse de nos partenaires (art. 7 al. 4). Et comme l’accord de Schengen est directement lié à celui de Dublin, l’association à ce dernier prendrait également fin.
Après le premier coup de canif aux accords bilatéraux qu’a représenté l’initiative sur l’immigration de masse, il serait dangereux de compter sur l’indulgence des autres Etats concernés.
Les référendaires, eux, ne s’en inquiètent pas. Ils affirment que les accords de Schengen-Dublin n’ont pas permis de renforcer la coopération européenne pour accroître la sécurité ni d’accélérer le traitement d’asile. Des critiques reprises des discours de l’UDC, mais largement démenties dans les faits. Ils sont persuadés qu’une solution sera trouvée pour l’échange des données. Pour Werner Salzmann, co-président du comité opposé au projet et conseiller national UDC, l’UE n’aurait aucun intérêt à ce que les 300’000 frontaliers soient subitement contrôlés aux frontières. Pour lui, la menace brandie par le Conseil fédéral est totalement irréaliste.
Ne pas brader les avantages de Schengen-Dublin
Or la Suisse a beaucoup d’intérêt à conserver les accords de Schengen et Dublin.
Les citoyens, tout comme les milieux économiques suisses, bénéficient fortement des facilités liées à l’association Schengen, notamment le passage des frontières, tant en voiture qu’en avion. Les visas Schengen profitent largement au tourisme suisse.
Cet accord comporte également de nombreux avantages dans le domaine de la sécurité. Il permet aux policiers suisses d’accéder à la base de données Schengen et d’améliorer la lutte contre la criminalité internationale.
L’accord de Dublin est directement lié à celui de Schengen. Sans lui, la Suisse deviendrait un pôle d’attraction pour les requérants d’asile puisque ces derniers ne pourraient plus être renvoyés dans le pays de leur première demande.
L’UDC n’attache aucune importance à tous ces avantages aussi bien sécuritaires qu’économiques. Seule lui importe la détérioration de nos rapports avec la coopération européenne multilatérale. Dans cette perspective, faire capoter la révision de la loi fédérale sur les armes ne représente qu’un épisode de la bataille.
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