
Agréable surprise pour les journalistes alémaniques et tessinois. Schweizer Medien, l’association patronale des éditeurs, leur propose de conclure une convention collective, ce qu’elle leur refusait depuis une longue décennie.
Origine de cette volte-face: un accord publicitaire entre Ringier, la SSR et Swisscom. Pour comprendre, suivons ce cheminement, curieux comme celui d’une balle de billard.
Au milieu de l’été donc, Ringier, le deuxième plus grand éditeur de Suisse, décide de créer, avec Swisscom et la SSR, une société chargée de gérer l’offre publicitaire multimédia. Cette option a notamment pour objectif de répondre à la concurrence de Google et de Facebook qui concentrent la moitié de la publicité numérique en Suisse.
La nouvelle société, déclare le patron de Ringier, pourrait s’ouvrir à tous. Cette offre reçoit un premier accueil positif de la part d’Hanspeter Lebrument, président de Schweizer Medien et des associations de journalistes.
Puis les choses se gâtent. Pietro Supino, président de Tamedia, premier éditeur de Suisse, met toute son ardeur à convaincre l’association des éditeurs de s’opposer à l’accord publicitaire de Ringier. C’est en tout cas ce qu’affirme dans son édition alémanique le magazine édité par les trois syndicats de journalistes Edito+Klartext.
La ferme attitude du patron de Tamedia ne surprend pas. C’est lui qui veut priver la SSR de toute publicité (DP 2075). De plus, la mésentente personnelle entre les deux plus grands éditeurs ne date pas d’hier. Ringier décide alors de quitter Schweizer Medien.
Ce divorce des éditeurs ne semble pas impressionner les journalistes alémaniques. Edito+Klartext entrevoit même, dans la rupture de l’opposition frontale entre la SSR et les éditeurs, une ouverture possible dans le débat sur l’avenir des médias suisses
La querelle entre les deux géants alémaniques inquiète en revanche les journalistes de Suisse romande. Ils sont au bénéfice d’une convention collective signée avec l’association Médias Suisses. Or Ringier quitte également cette association des éditeurs francophones. La convention collective romande pourrait donc se trouver menacée, ce que craint le syndicat impressum et que regrette lui-même Daniel Pillard, le directeur de Ringier Romandie.
Mais, dernier rebond en date, les éditeurs alémaniques proposent, au contraire, de renouer avec le partenariat social par une convention collective. C’est Pietro Supino, encore lui, qui a fait ce geste pour montrer que les éditeurs sont de bons employeurs. Une manière de se racheter une vertu.
Un fait pourrait changer le jeu et animer encore le débat sur l’avenir des médias suisses. La Commission de la concurrence a décidé de procéder à un examen approfondi du projet de création de la société publicitaire réunissant Ringier, la SSR et Swisscom. Cette nouvelle entité pourrait occuper une position dominante dans l’acquisition publicitaire. La Comco a quatre mois pour se prononcer sur une acceptation, une modification du projet ou son interdiction pure et simple.
Et si l’envie vous prend de passer de l’autre côté de l’écran, DP est ouvert aux nouvelles collaborations: prenez contact!