Souk ou bonne gouvernance ? Lors de la dernière
session des Chambres, le Conseil national s’est prononcé en faveur
d’une plus grande transparence des principaux salaires : mais pas
question de confier aux actionnaires le soin de les décider. Une
proposition d’amendement de Susanne Leutenegger Oberholzer (PS/BL) dans
ce sens n’a pas eu plus qu’un succès d’estime (58 voix contre 93). La
droite considère qu’il faut laisser aux sociétés anonymes le choix
d’introduire ou non cette solution dans leurs statuts. Elle craint
surtout que les assemblées générales se transforment en foires
d’empoigne autour des chiffres des feuilles de paie. Il est peu
probable que la majorité du parlement réserve un meilleur sort à la
proposition que s’apprête à formuler Christian Levrat (PS/FR) pour que
la rémunération des membres de la direction et du conseil
d’administration des sociétés anonymes soit fixée par l’assemblée
générale. Les comités de rémunération, sans réelle indépendance par
rapport au conseil d’administration, vont donc continuer à fixer les
salaires des principaux dirigeants.
La primauté de l’assemblée générale
Il
ne s’agit pourtant pas que de gros sous. Le fait que les
administrateurs décident de leur propre rémunération heurte de front la
séparation des pouvoirs au sein de l’entreprise. Le Code des
obligations prévoit d’ailleurs qu’il appartient aux actionnaires de
fixer les tantièmes, aujourd’hui abandonnés, mais qui servaient
auparavant de salaires aux membres du conseil d’administration (DP n°
1592). Il paraît donc conforme à l’esprit de la législation de rappeler
la primauté de l’assemblée générale. En revanche, on peut hésiter sur
la nécessité d’étendre cette règle à la direction qui rend des comptes
au seul conseil d’administration. Ethos préconise notamment que ces
salaires-là soient fixés par un comité de rémunération composé
exclusivement d’administrateurs non dirigeants. Un Peter Brabeck
(Nestlé) ou un Daniel Vasella (Novartis), porteurs de la double
casquette d’administrateur et de directeur, en seraient donc exclus.
Les
montants faramineux des salaires et les cumuls de fonctions aux allures
de potentat choquent l’opinion à juste titre. Ces dérives ne
constituent pourtant que les signes visibles de la perte de pouvoir des
actionnaires, pourtant propriétaires du capital, dans le fonctionnement
des entreprises. Sous la pression de certains investisseurs, et
notamment des salariés eux-mêmes par l’intermédiaire de leurs fonds de
pension, une inversion de tendance se fait jour. La dernière assemblée
générale de Nestlé n’avait rien d’une sinécure (DP n° 1642). Reste à
renforcer le pouvoir des actionnaires dans la loi elle-même. ad
Ethos
Ð Fondation suisse d’investissement pour un développement durable ;
lignes directrices de vote lors de l’assemblée générale :
www.ethosfund.ch/ethos/pdf/lignes_2005_f.pdf
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