On connaissait le peu de motivation de Christoph Blocher pour défendre le point de vue du Conseil fédéral dans certaines campagnes de votation. Mais, le conseiller fédéral fait parfois aussi fi de l’avis du gouvernement devant le parlement. Dernier exemple en date: l’entraide internationale en matière pénale. Cette procédure permet à un Etat étranger d’obtenir des autorités helvétiques qu’elles lui fournissent des preuves ou encore qu’elles lui remettent un individu. Un sujet sensible au royaume du secret bancaire. Actuellement, les décisions en matière d’entraide peuvent être contestées devant le Tribunal fédéral. Dans le cadre de la révision de l’organisation judiciaire (cf. DP 1617), le Conseil fédéral a proposé de maintenir une seule voie de recours, mais devant le nouveau Tribunal pénal fédéral.
Des procédures à rallonge
En octobre, le Conseil national admet un amendement qui permet un recours supplémentaire au Tribunal fédéral, ce qui allongerait les délais. Rien d’étonnant : ces procédures fâchent certains clients de la place financière ; leur longueur et leur complexité constituent une source de rémunération confortable pour nombre d’avocats. Des lobbies fort bien représentés au Parlement. La surprise, c’est que le représentant du Conseil fédéral, Christoph Blocher, a appelé les députés à soutenir cet amendement. Mieux, le conseiller fédéral cherche désormais à rallier le Conseil des Etats à cette solution. Que pense le Conseil fédéral de cette modification pas si anodine ? Le magistrat UDC paraît avoir agi sans consulter ses collègues. On peut douter que ceux-ci voient d’un bon œil un rallongement potentiel des procédures en matière d’entraide, alors que l’encre des paraphes sèche à peine au pied du traité de Schengen.
Les règles sont pourtant claires en la matière : le gouvernement adopte un projet qu’il transmet aux Chambres. Le représentant du collège doit ensuite le défendre et laisser aux parlementaires la responsabilité d’éventuels amendements. En s’invitant dans la procédure parlementaire, un membre du Conseil fédéral court-circuite le jeu institutionnel. Christoph Blocher joue trop souvent la partition en soliste. A se demander s’il veut réellement faire partie de l’orchestre.
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