La décision du Conseil des Etats de réduire d’un million la subvention attribuée à Pro Helvetia pour 2005 a provoqué de vives réactions. Elle a réouvert l’éternel débat sur les rapports difficiles entre l’Etat et la production culturelle. Mais plus fondamentalement, cette décision illustre l’impuissance du Parlement à façonner le budget de la Confédération en fonction de choix politiques.
Devant le Conseil national, le conseiller fédéral Hans-Rudolf Merz a rappelé la faible marge de manœuvre dont disposent les députés : 70% des dépenses inscrites au budget représentent des transferts imposés par la Constitution et les lois ; et le solde de 15 milliards a déjà subi une cure d’amaigrissement de 5 milliards imposée par deux programmes d’allégement successifs. C’est dire que le Parlement n’a plus guère de possibilités de réduire encore les dépenses. La Commission des finances du National n’a d’ailleurs trouvé que 60 millions d’économies supplémentaires, sur un total de dépenses de plus de 52 milliards !
Les députés en sont donc réduits à quelques gesticulations symboliques qui traduisent leur mauvaise humeur ou leur pseudo-souci de rigueur. La punition infligée à Pro Helvetia en est un exemple, ou la proposition d’un député UDC de diminuer de 5% les dépenses de personnel, comme si l’on pouvait décider en décembre de supprimer 1 400 à 3 000 places de travail dès le mois suivant.
Tout au long de l’année, le Parlement adopte des lois ou les révise sans trop se soucier des coûts ainsi engendrés. Puis, en décembre, il fait soudain vœu d’austérité, cherchant à tailler ici ou là, à l’aveugle, puisque, si le budget détaille à l’infini la nature des dépenses, il ne dit rien des prestations qui en dépendent, ni si ces prestations contribuent à la réalisation des objectifs poursuivis. Or c’est cette dernière perspective qui importe si l’on veut restituer au budget sa dimension politique (voir ci-contre). Tant que la Suisse n’aura pas fait ce pas, déjà franchi par d’autres pays, son budget exprimera le degré zéro de la politique.
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