
A se promener dans les beaux espaces d’Assens, les visiteurs vont de découvertes en découvertes, favorisées par la générosité des volumes et le parfait respect des artistes présentés.
Ce sont aujourd’hui les créations de Pierrette Gonseth-Favre qui se trouvent comme chez elles sous les cimaises aériennes du lieu. Panneaux rythmés de bambous et papiers roulés contrastent singulièrement avec d’arachnéennes constructions de fil de fer qui, toutes, racontent quelque chose de la vie humaine.
Arbres de vie, arbres généalogiques hantés de minuscules figures trébuchantes, racines (arbres souterrains) qui s’épanouissent en toiles d’araignée (Arachné/Ananké) nous entraînent dans une interrogation sans fin sur notre destin. Un mobile offre de minuscules bouteilles à la mer parmi perles et cristaux, tandis qu’un autre se hérisse de petits papiers roulés (messages secrets?) et qu’un troisième vibre de corps en mouvement, vers quel horizon?
C’est aussi tout un monde d’insectes-fleurs, de marguerites-araignées, d’abeilles aptères, de fourmis ailées, au bord du piège de la toile. La mezzanine accueille des dizaines de tout petits parachutistes, flottant et tombant sans bouger, désir d’Icare ou métaphore de la vie humaine.
Face à ces constructions fragiles, les panneaux de bambous et de papiers roulés offrent une solidité, voire une opacité, qui contraste avec la transparence des œuvres en fil de fer sur papier. Ceux-là soulignent l’énigme que nous oppose le réel et qu’interrogent inlassablement celles-ci.
Les rêveries cadencées de Martine Clerc occupent le bas de l’Espace. Tendresse des coloris, chaleur des tons, c’est un monde minéral qui déploie ses secrètes splendeurs.
Le pastel, le fusain et l’huile sont tour à tour utilisés pour évoquer ici un repli tectonique, là une stèle, plus loin un profond canyon. La technique de l’huile sur calque, m’explique l’artiste, lui permet de donner des rendus d’un lissé inégalable. Les œuvres en acquièrent un aspect de vieux verni qui rappelle le fond des portraits hollandais du 17e siècle: paysages avec figures absentes.
Rythmant l’accrochage, de grandes huiles sur toile imposent leur présence dans le chatoiement de couleurs rousses ou bleues.
Comme chez Pierrette Gonseth-Favre, l’énigme de l’homme est posée: là-bas, minuscule dans un monde qui le dépasse, ou ici, absent derrière les voiles du rêve.
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Pierrette Gonseth-Favre, née à Genève en 1943. Etudie le tissage et le dessin. Vit et travaille à Founex. Rétrospective en 2012 à l’Espace Arlaud à Lausanne. Expose régulièrement à la galerie Fallet à Genève et à la galerie Meier à Arth a/See-Goldau.
Martine Clerc, née à Neuchâtel en 1941. Etudes à l’université de Genève en Sciences de l’Education, licence en psychologie. Initiée à l’histoire de la peinture par Jean-Louis Ferrier à Neuchâtel et à sa pratique par Thérèse Martin à Lausanne. Vit et travaille à Lausanne. Expose en France (Annecy, Angoulême) et en Suisse romande.
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