
Or donc, ce dimanche 13 avril 2014, 37,5% des citoyens lausannois se sont prononcés sur le projet de plan partiel d’affectation comprenant la fameuse tour Beaulieu, dite Taoua, lauréate d’un concours d’architecture lancé en 2008.
Une petite majorité d’entre eux, 51,91% très exactement, ont refusé le projet, dans la plupart des cas pour cause de mocheté du bâtiment en trop grande hauteur. A ce reproche rédhibitoire, d’autres objections sont venues s’ajouter, tout aussi émotionnelles.
Du côté des partisans du projet, partis socialiste et libéral-radical réunis, on a beaucoup, mais en vain, insisté sur l’originalité de la tour de 27 étages aux affectations combinées, prête pour la société à 2000 watts, financée par des investisseurs privés construisant sur le domaine public aux termes d’un partenariat novateur.
Tout est donc à reprendre, ce que la Municipalité veut faire dans les meilleurs délais. Le sort du Centre de congrès et d’expositions de Beaulieu l’exige, tout comme les développements prévus dans le nord-ouest de la ville et l’indispensable desserte par le futur métro n° 3.
Mais ce nécessaire rattrapage risque de s’effectuer dans un climat politique alourdi. D’une part, on assiste à un désaccord patent entre le PS et les Verts. D’autre part, on constate que la méfiance du public à l’égard des autorités s’installe et se renforce. La parole publique est fortement mise en doute – et plus seulement par les défenseurs du patrimoine.
Lesquels ne cessent d’allonger la liste des projets à combattre à différents stades. Premiers visés: le Pôle muséal à la gare CFF, la Maison du livre sur les Côtes de Montbenon et, pour faire bon poids, divers éléments constitutifs du vaste projet Métamorphose pourtant retiré des bords du lac et concentré sur les hauts de la ville.
Les forces qui se sont manifestées dans la campagne anti-Taoua s’emploieront à faire prévaloir leur conception d’une ville immobile, refusant d’instinct le changement, l’hétérogénéité, la diversité, qui font le biotope de la société urbaine.
A qui la palme de l’impudence?
Reste à espérer que les débats se déroulent dans la bonne foi et le respect des propos de l’adversaire. A cet égard, les débats récents paraissent de très mauvais augure.
A qui attribuer la palme de l’impudence? Aux conservateurs de Défense de Lausanne, qui insinuent que les comptes soi-disant au rouge vif rendent les édiles prêts à tous les arrangements avec «un grand groupe de bâtisseurs et d’investisseurs dont le seul but est le lucre et qui ne feront aucun cadeau (sauf peut-être à ceux qui les servent)?» A l’architecte Mario Botta, qui critique violemment la position de Taoua isolée de son contexte, tout en oubliant qu’il a bâti lui-même sur les bords du lac de Lugano un certain Casino de Campione, le plus mal intégré des plus difformes blocs de béton? Ou à l’ancien conseiller communal de La Gauche Julien Sansonnens, qui dénonce les alliances contre nature du PS avec le parti libéral-radical et le lobby de l’hôtellerie et de l’immobilier tout en jubilant d’avoir gagné contre la tour Beaulieu en compagnie de l’UDC et de Défense de Lausanne?
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