Les Verts suisses ont vingt ans. Considéré à l’époque comme une force de contestation temporaire, lié à la lutte contre l’énergie nucléaire et circonscrit aux problèmes environnementaux, le mouvement a pourtant atteint l’âge adulte et fait même preuve d’une belle santé.
Celles et ceux qu’on appelait alors les «écolos» font leur entrée en politique institutionnelle en 1971 en ville de Neuchâtel, pour mieux défendre leur refus du tracé autoroutier le long des rives du lac. Puis, selon un modèle très helvétique, ils gravissent tous les échelons, communal, cantonal et fédéral. En 1977 déjà, ils réussissent à conquérir un siège au sein de la municipalité lausannoise et deux ans plus tard les Vaudois envoient à Berne le premier conseiller national vert. Aujourd’hui les Verts constituent le premier groupe parlementaire fédéral non gouvernemental, sont présents dans quatre exécutifs et dans dix-sept parlements cantonaux avec 120 députés. Dans les plus grandes villes suisses, ils permettent à des majorités de gauche de gouverner.
Ce positionnement à gauche a résulté d’une évolution progressive et lourde de conflits. En effet, à l’origine, les écologiques prétendaient rompre avec l’affrontement classique droite-gauche. Portés par les préoccupations environnementalistes de l’opinion suscitées par les couacs de l’énergie nucléaire – Tchernobyl en particulier – et le dépérissement des forêts, ils se rapprochent de la gauche qui a adopté peu ou prou leurs revendications écologistes. Les tensions entre les fondamentalistes et les réalistes se résorbent et le mouvement intègre une partie de l’extrême gauche revenue de ses illusions révolutionnaires. Mais, lors des élections fédérales de 1995, son aversion pour l’Europe – il est contre l’adhésion à l’EEE – et son rejet des engagements internationaux de la Suisse – il refuse l’entrée à la Banque mondiale (BM) et au Fonds monétaire (FMI) – comme son opposition aux nouvelles transversales alpines, lui valent une sévère défaite.
Les Verts redressent alors la barre. En adhérant à l’idée européenne et en offrant un programme étoffé, notamment en matière sociale, ils séduisent un électorat jeune et issu des classes moyennes, déçu ou réticent à l’égard des grands partis. Les Verts peuvent dès lors espérer une belle progression cet automne.
Deux risques guettent la plus jeune des formations politiques. A s’aligner trop étroitement sur la gauche, voire l’extrême gauche, le parti peut perdre le profil original qui a fait son succès. Une position par trop rigide sur le dossier chaud des manipulations génétiques et sa méfiance marquée à l’égard des développements actuels de la recherche scientifique lui coûteraient à coup sûr la sympathie d’une partie des intellectuels et des techniciens qu’il a su séduire.
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