Dans un livre à paraître prochainement, deux
journalistes scientifiques allemands font le point de la littérature
spécialisée en matière de dépistage précoce du cancer. Le bilan est
tout sauf positif, excepté pour une industrie qui se nourrit de la peur
des patients.
Sont en cause, des erreurs trop fréquentes de
diagnostic par surestimation ou omission : des tumeurs supposées
malignes se révèlent bénignes après opération ou un test négatif ne
garantit pas l’absence de cancer. Que ce soit la mammographie, le test
de dépistage du cancer de la prostate ou de l’intestin, l’analyse
critique des résultats permet de mettre en doute l’efficacité de telles
démarches. Sur deux échantillons de 1000 femmes âgées de 50 à 60 ans,
suivies durant dix ans, cinq décès dus au cancer du sein ont été
enregistrés dans l’échantillon soumis à la mammographie tous les deux
ans, contre huit décès pour les femmes n’ayant pas bénéficié de cet
examen.
Or ces tests sont en voie de généralisation, en Suisse
également. Il suffit que le médecin ait un soupçon pour que l’assurance
maladie prenne en charge le coût de l’examen. Soit les praticiens ne
sont pas suffisamment informés sur l’efficacité réelle des tests et des
scanners, soit ils préfèrent tranquilliser leurs patients, ou plus
prosaïquement faire de l’argent.
Malgré ces lacunes, il est probable
que ce qu’il faut bien appeler une industrie va encore se développer,
tant il est vrai que ce rituel du test répond à un besoin profond de se
rassurer, même si cette réassurance relève parfois de l’illusion. A
moins que l’Etat et les assurances ne prennent des mesures pour
garantir une meilleure qualité de l’analyse des résultats –
l’obligation d’une double lecture par exemple – et une information des
patients.
Tages Anzeiger, 27 février 2003
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