Le sommet de Rio en 1992 n’a guère fait reculer la pauvreté et diminuer les atteintes à l’environnement. Par contre, il a rendu populaire le concept de développement durable dont les programmes politiques se sont depuis lors emparés. A cette nuance près qu’aucun de ces programmes ne respecte les conditions d’un tel développement. Le développement durable exige que nous nous comportions de manière à ce que les générations suivantes ne soient pas entravées dans leur propre développement. Or nos économies continuent à fonctionner en ponctionnant le capital des ressources non renouvelables. Nous vivons d’une manière qui obère les possibilités de développement de nos descendants. Et toutes les précautions prises en matière de protection de l’environnement n’y changent rien.
La décroissance impossible
Les écologistes les plus radicaux postulent non pas un arrêt de la croissance mais une décroissance. Selon certaines estimations, l’exigence d’égalité voudrait que les pays du tiers-monde puissent doubler leur consommation en un demi-siècle, alors que dans le même délai le monde industriel serait condamné à diminuer la sienne de 5% par an. Ce scénario est politiquement irréalisable et socialement explosif.
L’économie au service de l’environnement
Si la croissance continue, fondée sur la destruction du patrimoine naturel, se révèle insoutenables, tout comme la décroissance, reste à inventer une autre croissance. Jacques Généreux, professeur à l’Institut d’études politiques de Paris en esquisse les contours dans la dernière livraison du mensuel Alternatives économiques, en se référant notamment aux travaux de Lester Brown. L’éco-économie propose un renversement de perspective : l’environnement n’est plus une contrainte à intégrer dans le système économique. Au contraire, l’économie devient l’outil de production d’un meilleur environnement. Fondée sur l’utilisation des énergies renouvelables, le recyclage généralisé et l’essor des services, cette économie assurerait tout à la fois le plein emploi et l’amélioration du niveau de vie. Un niveau de vie qui ne se mesurerait plus à la quantité des biens matériels disponibles.
Le progrès justifie les sacrifices
Pour Jacques Généreux, une société n’accepte des efforts que dans la mesure où ils sont justifiés par une perspective de progrès. Il ne s’agit pas de faire peur en brandissant des scénarios catastrophiques mais de faire envie. jd
Alternatives économiques, septembre 2002 (www.alternatives-economiques.fr).
L’ouvrage de Lester Brown sur l’éco-économie paraîtra en traduction française au Seuil en janvier 2003.
Un exemple d’écologie industrielle
Dans le même numéro, Alternatives économiques rend compte d’une réalisation industrielle danoise qui fonctionne en boucle, comme un écosystème naturel.
Dans le port de Kalundborg, une symbiose industrielle s’est progressivement mise en place depuis trente ans de façon pragmatique. Au cœur du système, la plus grande centrale électrique du pays. Elle reçoit les eaux usées d’une raffinerie de pétrole proche pour son refroidissement et vend à cette dernière de la vapeur d’eau, livrée également à une entreprise de biotechnologie, à Gyproc une usine de panneaux de plâtre, à la municipalité et à une ferme d’acquaculture. La désulfuration du gaz de combustion de la centrale électrique permet, en combinaison avec de la chaux, de produire du gypse, matière première pour Gyproc.
Les échanges mis en œuvre sur ce site ont permis de réduire de 20 000 tonnes par an la consommation de pétrole, de 200 000 tonnes celle du gypse et de 2,9 millions de m3 la consommation d’eau. Avec, à la clé, une réduction importante des déchets et des gaz polluants. Les investissements nécessaires sont estimés à 84 millions d’euros et les gains annuels à 17 millions d’euros, soit un retour sur investissement de cinq ans. jd
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