Le Vaudois (depuis trois générations) Pierre Jeanneret aurait-il la nostalgie de l’ancien baillage bernois? Il évoque avec une telle tendresse ses relations avec la Ville fédérale qu’on pourrait le soupçonner.
Mettons rapidement les choses au point. Berne est incontestablement une très belle ville. Ses habitants sont pour la plupart charmants et même hospitaliers. Le personnel de ses commerces est en général accueillant et n’hésite pas à venir au secours du chaland francophone en lui répondant dans sa langue. Mais ces qualités-là doivent certainement plus à un esprit d’entreprise bien compris qu’au bilinguisme institutionnel bernois. Et ensuite, c’est aller vite en besogne d’affirmer que ces caractéristiques individuelles justifient le statut de pont entre la Suisse alémanique et la Romandie que s’arroge la Berne cantonale pour justifier sa main mise sur ses territoires jurassiens.
Le journaliste José Ribeaud, rédacteur en chef du Téléjournal romand à Zurich de 1974 à 1982, aujourd’hui retraité dans cette ville, fait un sort à cette prétention bernoise dans un article bien documenté du Quotidien jurassien (9.11.2013): Berne canton-pont, une imposture.
Or, ce n’est pas le bilinguisme du canton de Berne qui l’amène à ambitionner de représenter un lien entre la Suisse alémanique et la Romandie. Les faits d’ailleurs sont têtus, ce canton a très rarement voté comme la Suisse romande dans les grands débats fédéraux. C’est par opportunisme que Berne souhaite avoir un pied dans les deux régions linguistiques. C’est en effet par intérêt (égoïste diront certains) que ce canton cherche à se donner ce rôle de pont culturel. Sans cette dimension, convoitée plus qu’effective, Berne ne serait qu’un canton alémanique comme les autres. Pourtant siège de la capitale du pays, il a en effet progressivement perdu son influence politique au profit de Zurich, véritable centre national de décision.
C’est vrai que sans ses districts francophones, la Berne cantonale serait nue. Elle ne pourrait plus utiliser son bilinguisme pour justifier ses ambitions géopolitiques. Mais, avec ou sans ses 5% de francophones du Jura bernois, le canton de Berne a et aura toujours besoin de s’appuyer sur la Romandie pour exister en Suisse. Cela ne lui donne toutefois aucune légitimité à apparaître comme seul garant de l’équilibre confédéral.
Et si l’envie vous prend de passer de l’autre côté de l’écran, DP est ouvert aux nouvelles collaborations: prenez contact!