Ces derniers temps les bouchons se multiplient sur l’autoroute A2 qui relie Bâle à
Chiasso. Le phénomène est courant en fin de semaine et plus lors des week-ends
ruer vers le Sud. Mais il prend une nouvelle avec la levée de la limite de 28 tonnes pour les poids lourds. De ce fait, l’axe du Gotthard devient le passage privilégié pour le transit des marchandises entre le Nord et le Sud de l’Europe, en termes de coûts et de distance. Le Conseil fédéral et les cantons riverains ont donc convenu de parquer le trop-plein de camions tout au long de l’axe, sur l’autoroute elle-même. La mesure se veut clairement dissuasive, indication claire aux transporteurs que la Suisse ne dispose que de capacités de transit limitées. Elle
signifie tout aussi clairement la malfaçon de l’accord de transit signé avec l’Union européenne. En effet, le principe de la libre circulation des biens et des personnes couplé à la liberté du moyen de transport, en clair le primat du marché, ne peut fonctionner : le prix du transport routier ne couvre pas les coûts engendrés Ð Bruxelles a imposé un tarif trop bas Ð et le chemin de fer ne dispose pas encore des capacités nécessaires pour absorber un volume suffisant de marchandises.
Car c’est bien là que réside le problème. Ni le doublement du tunnel du Gotthard, ni l’aménagement des passages douaniers à Bâle et à Chiasso n’y apporteront de solution durable. Bien au contraire, toute amélioration de la fluidité du trafic ne ferait qu’augmenter l’attractivité de l’axe et, par conséquent, réapparaître les bouchons dont on croyait s’être débarrassé. Toutes les mesures d’allégement préconisées par le lobby de la route Ð levée de l’interdiction de circuler la nuit, élargissement des heures d’ouverture des postes douaniers, parcage des camions hors de l’autoroute et installation de commodités pour les chauffeurs Ð constitueraient un encouragement à persévérer dans une voie sans issue, celle d’un développement continu du transport routier, sans égard pour les nuisances environnementales et humaines. L’Union européenne table sur les mécanismes du marché et la concurrence pour promouvoir un système de transport efficient. Fort bien. Mais qu’elle prenne alors ses principes au sérieux en créant les conditions d’une concurrence réelle, et en premier lieu en exigeant la prise en charge totale des coûts réels engendrés par chaque moyen de transport. L’Europe donnerait ainsi l’exemple d’une politique raisonnée, conçue en tenant compte de l’intérêt général et non de la fuite en avant d’un véhicule fou sans chauffeur. JD
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