Le rajeunissement de la Loi sur le cinéma n’aura pas lieu. Les distributeurs ont entrepris avec succès un lobbying auprès des parlementaires.
Sur la scène fédérale, le scénario législatif est bien rôdé. Avant d’être présenté au Parlement, tout projet fait l’objet d’une large consultation des milieux intéressés, de manière à éviter l’échec référendaire. Certes les députés restent maîtres du jeu. En commission ou en séance plénière, ils ont tout loisir de modifier telle ou telle disposition, voire, s’ils sont mécontents du texte proposé, de renvoyer l’ouvrage en commission pour amélioration.
La Loi fédérale sur le cinéma attend depuis trois décennies un rajeunissement imposé par l’évolution de ce secteur culturel. Mais les partenaires sont coriaces et le renouveau tarde à voir le jour. Ruth Dreifuss demande alors aux professionnels de la branche d’élaborer une solution qui garantisse une offre suffisamment diversifiée dans un marché dominé par la production américaine. L’époque est à l’autorégulation ; la Confédération gère déjà de cette façon les économies d’énergie et les émissions de CO2. Berne n’interviendra que si la branche se révèle incapable d’assurer cette diversité, en prélevant une taxe d’incitation sur chaque billet d’entrée dans les régions où l’offre de films est trop restreinte. L’argent récolté financera un fonds de promotion de l’offre cinématographique. L’été dernier au festival de Locarno, Berne et les professionnels se mettent d’accord et le projet de loi ne fait que reprendre dans ses grandes lignes les termes de cet accord. La commission du Conseil des Etats, conseil prioritaire dans ce dossier, l’approuve largement. En plénum par contre, une impressionnante majorité renvoie sa copie au Conseil fédéral, sans faire une quelconque proposition de modification.
Il s’avère que le président de l’association des distributeurs, le sénateur fribourgeois Anton Cottier, a travaillé au corps ses collègues pour qu’ils refusent le projet, reniant ainsi l’accord préalablement réalisé entre les professionnels de la branche et l’administration. Des acteurs peu fiables, des parlementaires sous influence et peu informés du dossier, à un point tel qu’ils sont incapables de suggérer d’autres solutions, le cinéma en Suisse n’est pas prêt de bénéficier du soutien que lui promet pourtant la Constitution pour encourager sa diversité et sa qualité. jd
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