Les organisations écologistes s’en sont toujours défendues : non, elles n’abusent pas du droit de recours que leur attribuent les législations sur la protection de la nature. Une appréciation que ne partagent pas ceux qu’irritent ces empêcheurs de construire et qui n’ont cesse de faire abroger ce qu’ils considèrent comme un privilège abusif.
Les faits sont maintenant établis et ne prêtent plus à discussion. Une étude indépendante*, commandée par l’Office fédéral de l’environnement, des forêts et du paysage (OFEFP), donne raison aux écologistes : les associations ayant qualité pour agir n’exercent leurs droits qu’avec modération et souvent avec raison. Pour preuve leur taux élevé de succès devant les tribunaux.
La Commission des affaires juridiques du Conseil national traite actuellement d’une initiative parlementaire exigeant la suppression de ce droit de recours. C’est le dernier épisode d’une longue suite d’interventions de ce genre. Devant les faits présentés par l’OFEFP, on peut espérer que, parmi les 84 signataires de cette initiative, il s’en trouvera quelques-uns pour changer d’avis. Pour les autres, ne nous faisons pas d’illusion. Au-delà de la suppression du droit de recours, c’est aux dispositions légales de protection de l’environnement qu’ils en ont. Mais ils n’osent pas le dire ouvertement. Alors ils s’attaquent aux organisations qui se sont donné pour tâche la sauvegarde de la nature.
Sans ces organisations et leur possibilité de recourir, que se passerait-il ? Un tranquille face-à-face entre des administrations cantonales plus sensibles au court terme économique qu’au développement durable et des promoteurs pressés de réaliser leurs projets. En clair, la loi serait appliquée de manière lacunaire. Les adversaires du droit de recours des associations le savent pertinemment. Mais quand il s’agit de parlementaires dont la mission première consiste à édicter les lois, on peut parler de double langage : j’édicte, mais je compte bien que ce droit ne soit pas appliqué. Quand, de plus, il s’agit de députés Ð en particulier ceux de l’UDC et de la droite radicale Ð très à cheval sur la loi et l’ordre, on croit rêver : les fauteurs de troubles, les ennemis de l’intérieur seraient-ils parvenus à infiltrer à ce point les institutions démocratiques ?
Face à cette offensive en règle contre l’Etat de droit et la légitimité démocratique, il faut non seulement défendre vigoureusement le droit de recours des associations, mais encore reconnaître leur rôle central dans la mise en œuvre de l’aménagement du territoire et de la protection de l’environnement. A ce titre, on pourrait même imaginer un dédommagement financier pour prestations indispensables à la défense de l’intérêt public. JD
*Alexandre Flückiger, Charles-Albert Morand, Thierry Tanquerel, Evaluation du droit de recours des organisations écologistes.
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