
A Davos, le premier ministre britannique s’est déclaré partisan d’un «capitalisme éthique et responsable». A l’ordre du jour du prochain sommet du G8 en juin 2013, David Cameron veut inscrire les thèmes de la fiscalité et de la transparence. Il s’en est pris avec virulence aux entreprises qui éludent l’impôt et ne reculent pas devant des pratiques commerciales corrompues dans les pays pauvres.
Après le scandale provoqué par la révélation que des sociétés – Starbucks, Apple et d’autres – se contentent de livrer des sommes symboliques au fisc britannique malgré de confortables bénéfices, l’indignation officielle ne pouvait manquer au rendez-vous. Pourtant depuis des décennies la Grande-Bretagne a toléré si ce n’est encouragé le développement de paradis fiscaux qui facilitent les comportements aujourd’hui dénoncés.
Dans un remarquable ouvrage, le journaliste financier Nicholas Shaxson a décrit la naissance et le développement des paradis fiscaux (DP 1964). Il montre en particulier comment Londres, à partir des années 60 du siècle dernier, a tissé un réseau mondial de places financières destinées à saper les lois fiscales des autres pays.
Dans un premier cercle, les îles anglo-normandes – Jersey, Guernesey et l’île de Man – qui attirent surtout les fraudeurs européens. Puis les îles des Caraïbes – les Bahamas, ensuite les îles Caïmans –, spécialisées dans le drainage des fonds américains, du Nord comme du Sud. Enfin un chapelet de territoires éparpillés à travers la planète, de l’océan Pacifique au Moyen-Orient en passant par Hong Kong. Tous ces territoires, sauf le dernier, appartiennent à la Couronne. Mais face aux critiques, Londres se retranche derrière leur autonomie.
A plusieurs reprises le Trésor britannique a mis en garde le gouvernement devant la mauvaise réputation et les pertes fiscales engendrées par ce système. En vain. La Banque d’Angleterre et la City ont toujours eu le dernier mot. Et jusqu’à preuve du contraire, l’indignation de David Cameron n’y changera rien.
Depuis plusieurs années, la Suisse subit les pressions constantes des Etats dont l’argent de leurs ressortissants a trouvé refuge chez nous. Elle a fait le dos rond, ne cédant qu’en dernière instance lorsque les mesures de rétorsion paraissaient par trop dommageables.
La stratégie helvétique du hérisson, tout comme les plaintes du petit malmené par les grands, ne sont plus de mise. Fiscalité et transparence, annonce le premier ministre britannique. Fort bien. Alors mettons cartes sur table.
G8 et G20, OCDE sont les lieux privilégiés de négociation pour éliminer les paradis fiscaux. Les grands Etats en ont les moyens. Que la Suisse mette officiellement la question à l’ordre du jour: d’accord nous ne sommes pas blancs comme neige; mais l’égalité de traitement exige que tous les pécheurs soient remis en ordre. Sans quoi la lutte sélective contre l’évasion fiscale ne relèverait que d’une pratique de concurrence déloyale.
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