Etonner, surprendre, personnaliser, tels sont les maître mots de l’action politique aujourd’hui. Pour retenir l’attention d’un public gavé d’informations et d’images, rien ne vaut la distillation hebdomadaire de déclarations musclées, de propositions détonantes, d’attaques rondement menées contre l’adversaire. Les médias sont friands de cette forme de politique-spectacle quand ils ne la suscitent pas. Le match de boxe dénommé Arena, qui, chaque semaine, tient lieu d’émission politique sur la chaîne de TV alémanique, est emblématique de cette manière de communiquer au sujet de la chose publique.
Or cette image de la politique, valorisant les personnes et les conflits, n’est que pure mise en scène. Le jeu consiste uniquement à donner l’illusion du mouvement, à impressionner le spectateur-citoyen. Par contre, il ne contribue en rien à éclairer les enjeux et à faire avancer les solutions. Lorsque l’UDC présente sa nouvelle initiative sur l’asile, elle veut signifier qu’elle seule est à l’écoute des préoccupations populaires. Pourtant la lecture rapide du texte montre que les mesures préconisées sont, soit déjà prises, sans efficacité aucune ou simplement inapplicables. Les dirigeants de l’UDC le savent pertinemment, ils jettent donc de la poudre aux yeux.
Or la politique concrète, celle qui aboutit à des décisions importantes pour la vie des gens, présente un tout autre visage. Un visage hélas plus modeste, moins m’as-tu vu, peu attractif pour le téléjournal et les gros titres de première page. Au cours de la législature qui s’achève, les exemples ne manquent pas de résultats substantiels acquis à force de discussions Ð le plus souvent en commission Ð, de négociations et de coalitions changeantes sans cesse échafaudées. C’est ainsi qu’ont abouti le projet de réforme de la Constitution fédérale, la redevance sur les poids lourds, le financement des transversales alpines, une politique de la drogue innovante. C’est ainsi que verront le jour vraisemblablement une taxe sur l’énergie, favorable aussi bien à l’économie qu’à l’environnement, et les nécessaires mesures d’accompagnement aux accords bilatéraux.
Cette démarche lente et ardue mais réellement efficace reste largement méconnue de l’opinion, qui ne perçoit plus la vie politique qu’à travers la lorgnette déformante de controverses creuses et d’effets de manche dérisoires. Partis et parlementaires devraient donc se préoccuper davantage de la rendre plus transparente pour que citoyennes et citoyens ne se détournent pas en plus grand nombre encore de la chose publique. Cette démarche ne gomme en aucune manière les divergences entre les partis. Elle permet de les surmonter afin d’apporter les réponses qu’aucun partenaire ne peut à lui seul imposer. JD
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