
L’électricité des barrages aiguise tous les appétits. Les concessions sur l’utilisation des forces hydrauliques arrivent à échéance au moment même où la Suisse amorce l’ère post nucléaire.
La capacité de stockage des barrages est irremplaçable pour combler l’interruption de production du solaire ou des éoliennes. Les cantons ont la haute main sur cet or des Alpes. La Constitution fédérale (art. 76) et la loi fédérale sur l’utilisation des forces hydrauliques précisent que les cantons disposent des ressources en eau et que leur législation règle l’octroi des concessions. La Confédération garde cependant le droit de légiférer sur la protection des eaux, sur la sécurité des barrages et statue sur les droits de concession qui intéressent plusieurs cantons ou un Etat étranger.
Cette large prérogative cantonale est remise en question. Le président des Forces motrices bernoises et conseiller national PBD Urs Gasche ouvre le combat (Tages-Anzeiger, 15 mai). Dans un papier de position sur l’énergie, son parti demande une adaptation rapide du cadre légal. En vigueur depuis des décennies, il ne répond plus à la situation actuelle. La récente déclaration commune de l’Allemagne, de l’Autriche et de la Suisse sur le développement des centrales à pompage-turbinage donne des arguments aux partisans du changement.
Les cantons alpins défendent fermement leurs prérogatives. Le conseiller d’Etat grison PDC Mario Cavigelli dénonce les intérêts particuliers défendus par le président des Forces motrices bernoises. Le Valais quant à lui, se mobilise depuis deux ans déjà sur la question. Un vif débat s’est engagé pour la réappropriation de ses barrages.
En 2010, six communes du Bas-Valais ont ouvert les feux. Elles ont conclu un accord avec les CFF pour renouveler la concession de Barberine 25 ans avant son échéance, comme le permet la loi fédérale. Elles ont profité d’une hausse substantielle de la redevance. C’est un avantage financier à court terme. Mais la propriété du barrage reste en main «étrangère», c’est-à-dire hors du canton.
Le PDC s’oppose à cette stratégie individuelle des communes. Il propose un «modèle valaisan» pour se réapproprier les installations hydrauliques qui sont à 80% contrôlées par des sociétés qui paient leurs impôts hors du Valais. Les collectivités publiques cantonales devraient acquérir au minimum 67% de leur valeur, ce qui permettrait de contrôler l’équivalent de la consommation électrique du Valais. Au lieu de toucher de simples redevances, les communes deviendraient actionnaires.
Le conseiller d’Etat PDC Jean-Michel Cina, responsable du dossier, est sur la même ligne. Il vient de proposer de bloquer pendant cinq ans toute modification des concessions hydrauliques, le temps de procéder à une révision de la loi cantonale en vue de mettre en application le «modèle valaisan» qui imposerait aux communes une politique unifiée. Cette claire stratégie cantonale devrait permettre au Valais de mieux dialoguer avec la Confédération. Ce serait un argument pour éviter un transfert de compétences vers l’Etat fédéral.
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