
Les journaux sont denrée périssable. Verba data. Charles-F. Pochon leur trouvait pourtant un prix quand ils étaient désactualisés. Il les conservait non pas en spécialiste, bibliothécaire ou historien, mais en amateur ayant délimité son domaine. Certes, il était fier de posséder quelques pièces rares où étaient annoncés en gros titres les grands chocs de notre histoire, mais Charles-F. Pochon n’était pas qu’un collectionneur.
S’il recherchait les feuilles «mortes», ce n’était pas pour vivre à une autre époque que la sienne. Il était un social-démocrate convaincu, un coopérateur actif et, par liens familiaux mais aussi par conviction, un syndicaliste authentique.
Ce passionné de journaux, à l’affût de l’imprimé, ne pouvait pas, en 1963, ne pas avoir entendu parler du lancement de Domaine Public. Et passant de la collection à l’action, il se retrouva sur la liste des cosignataires du premier numéro. Depuis, en près de cinquante ans, sa fidélité a été sans faille.
Habitant Berne, parlant le dialecte, haut fonctionnaire à l’OFIAMT (prédécesseur du SECO) puis responsable du nouveau Bureau de la consommation, foncièrement fédéraliste, il ne se sentait nullement exilé dans la ville fédérale. Il était représentatif de ce groupe de Vaudois de Berne qui, le 24 janvier, se réunissaient, toujours en présence d’un conseiller d’Etat venu officiellement de Lausanne, pour fêter l’indépendance dans la ville même de LL.EE.
Charles Pochon jouait à DP un rôle spécifique. Il n’était pas attiré par l’écriture. En revanche, il anima longtemps un groupe qui signait Berner, et surtout il était un documentaliste hors pair. Pas besoin de le solliciter, il repérait le sujet sur lequel chacun travaillait et, avant la publication, on recevait une grande enveloppe jaune, format A4, bourrée de coupures de presse. Apport précieux pour le récipiendaire, et moyen pour l’expéditeur de faire de la place chez lui où le flux d’imprimés montait comme rivière en crue.
Charles-F. Pochon, avec sa femme Marcelle, que nous saluons affectueusement, participait régulièrement à nos séances de discussion interne et à la rencontre annuelle de Montaubion. Il surprenait par sa voix forte et parfois, sortant de son rôle de sage, par sa prédiction de surprises politiques.
Le triomphe de l’informatique a été pour lui une rupture générationnelle, même si les journaux papier n’ont pas disparu – il recevait chaque semaine par les bons soins d’Yvette Jaggi l’édition pdf de DP.
Toutefois, les participations s’espacèrent, les enveloppes jaunes et la documentation se firent plus rares, et brusquement vint l’enveloppe à bordure noire.
André Gavillet et toute l’équipe de DP
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