Le consommateur final connaît très exactement le prix qu’il paie pour un kWh d’électricité. Il lui suffit de consulter sa facture mensuelle. Mais déterminer le coût de production d’un kWh d’origine nucléaire relève du casse-tête.
Dans un rapport en réponse au postulat Ory, daté de mai 2008, le Conseil fédéral admet qu’il n’est pas possible d’effectuer un calcul sérieux du coût réel du nucléaire. Weinmann-Energies, un bureau d’ingénieurs-conseils spécialisé en matière énergétique, a fait le même constat d’opacité. Dans une étude publiée en 2009, il aboutit à des coûts supérieurs à ceux avancés par le Conseil fédéral. En cause, les bases de calcul peu explicites de l’administration: le coût se réfère-t-il à la puissance installée ou à la puissance disponible des installations, à une durée de fonctionnement théorique ou réelle, compte tenu des arrêts de production provoqués par des incidents techniques ou imposés par des travaux de maintenance?
Malgré ces différences – entre 3,64 et 6,67 centimes le kWh pour la centrale de Gösgen; entre 5,09 et 9,04 pour celle de Leibstadt -, le coût de production du kWh nucléaire reste sensiblement plus bas que celui des énergies renouvelables. C’est d’ailleurs l’un des arguments que font valoir les entreprises électriques projetant la construction de nouvelles centrales. Mais, pour asseoir leur crédibilité, ces dernières devraient d’abord fournir des chiffres solides et incontestables.
Cette transparence ne suffirait pourtant pas à convaincre des avantages en terme de coût de l’électricité nucléaire. En effet, après la catastrophe de Fukushima, les autorités vont sensiblement durcir les exigences en matière de sécurité. Ce qui, pour les spécialistes en investissements durables de la banque Sarasin, pourrait tripler le coût de production (Tages-Anzeiger, 9.04.11). Des spécialistes pour qui l’énergie nucléaire n’est tout simplement plus concurrentielle face à des énergies renouvelables dont les coûts ne cessent de baisser.
Ce n’est pas tout. L’énergie nucléaire engendre des coûts externes qui ne se reflètent pas dans son prix. On connaît les conditions désastreuses d’extraction du minerai dans les pays en développement et leur impact négatif sur les populations et l’environnement. Le coût de la gestion des déchets durant les prochains siècles, voire millénaires, n’est pas incluse dans ce prix. Pas plus que celui des dégâts en cas d’accident majeur que les assureurs refusent de couvrir. Rappelons qu’au contraire des autres sources d’énergie, le risque nucléaire fait l’objet d’une couverture de droit public puisqu’une loi fédérale institue une responsabilité de la Confédération jusqu’à hauteur d’un milliard de francs par installation. Les collectivités publiques et les générations futures sont donc priées d’assumer le cas échéant.
Point n’est besoin d’argumenter longuement. Le nucléaire est économiquement mort. Seuls les électriciens, qui croient ainsi préserver leur monopole, et economiesuisse, qui les relaie aveuglément, ne l’ont pas compris.
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