
La réforme fiscale II, acceptée en votation populaire le 24 février 2008, traite du remboursement d’autres apports en capitaux, de versements supplémentaires et d’agios de la même manière que le remboursement du capital-actions, remboursement qui n’est pas considéré comme un revenu et n’est donc soumis ni à l’impôt fédéral direct, ni à l’impôt cantonal sur le revenu (DP 1908).
Rembourser c’est «rendre l’argent emprunté, rendre à quelqu’un l’argent qu’il a déboursé» (Petit Larousse). Qu’un actionnaire puisse se faire rembourser franc d’impôts la valeur nominale de l’action qu’il a achetée répond à une certaine logique: on lui rend l’argent versé. Ce n’est pas un revenu. Il n’est donc pas imposable. Que ce même actionnaire puisse se faire rembourser, aux mêmes conditions, des apports supplémentaires qu’il aurait faits répond à la même logique.
Or il semble bien qu’on veuille donner au nouvel article 20, alinéa 3, de la loi sur l’impôt fédéral direct une tout autre interprétation: il ne s’agit plus de rembourser celui qui a placé de l’argent dans l’entreprise, mais de distribuer à l’ensemble des actionnaires les montants versés par certains d’entre eux, et notamment les agios prélevés lors d’augmentations de capital. L’actionnaire qui n’a pas contribué à ces apports en capitaux ne bénéficie donc pas d’un remboursement, mais bien d’un revenu qui devrait donc être imposé.
Dans de petites sociétés, dans les PME, il est utile de pouvoir rembourser ceux qui ont fourni les capitaux nécessaires, notamment au moment de la liquidation de l’entreprise ou de son transfert à des successeurs, à la retraite de leur patron, ou encore à ses héritiers. C’est ainsi que le Conseil fédéral a justifié cette réforme. Dans de telles sociétés, il est possible d’identifier ces apports et donc d’en contrôler le remboursement.
Dans les grandes SA, avec plusieurs milliers d’actionnaires, il est facile d’identifier ceux qui ont fournis le capital social et donc de le leur rembourser: ce sont ceux qui en détiennent les actions. Tel n’est pas le cas par contre pour les autres apports en capitaux, et notamment les agios. C’est pourquoi l’administration des contributions se limite à contrôler le montant total des apports en capitaux. Elle semble admettre que leur «remboursement» prenne la forme d’une distribution répartie entre tous les actionnaires de ce qui ne devient alors plus rien d’autre qu’un dividende sur lequel l’actionnaire ne payera pas d’impôt.
La volonté de ne plus soumettre à l’impôt anticipé les montants versés aux actionnaires du fait d’apports en capitaux prouve bien que l’administration n’a pas l’intention de limiter le remboursement en franchise d’impôts aux seuls actionnaires ayant réellement faits des versements supplémentaires.
Rembourser à des actionnaires de l’argent qu’ils n’ont pas versé revient à leur éviter de payer l’impôt sur une partie de leur revenu. Une pratique contraire aux principes de l’universalité, de l’égalité de traitement et de la capacité économique inscrit à l’article 127 de la Constitution. Il faut espérer que le Conseil fédéral revoie son interprétation de la notion de remboursement. Faute de quoi les cantons, directement touchés à hauteur de plusieurs milliards de francs semble-t-il, devront faire recours. Il faut espérer surtout qu’ils vérifieront, pour chacun de leur contribuable, que les remboursements reçus correspondent bien à des apports en capitaux réalisés après le 31 décembre 1996, comme le prévoit la loi.
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